Je débute à moto (partie 2) !
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Conseils aux jeunes motards [TRES LONG] - partie 2/2
Rouler en groupe:
La conduite en groupe demande certaines compétences supplémentaires, en plus de celles nécessaires à la simple conduite d'une moto. Les objectifs sont les suivants: conserver un haut niveau de sécurité (ne pas s'accrocher entre motards du même groupe), ne perdre personne en route, et accessoirement conserver une vitesse moyenne raisonnable (à peine inférieure à celle qu'on aurait si on était seul). Rouler en groupe ne doit pas occasionner un stress ou une fatigue supplémentaire, préjudiciables à la sécurité.
Il y a plusieurs façon de rouler en groupe, selon le niveau de pilotage des participants, leur nombre, et l'humeur du moment (balade tranquille, balade rapide, arsouille). Certaines règles s'appliquent en permanence, quel que soit le rythme (rouler en quinconce par exemple). D'autres sont purement indicative (il y a plusieurs techniques pour ne perdre personne). L'important est de bien connaitre l'ensemble des règles élémentaires, et de se mettre d'accord.
Pour rouler en groupe, il faut qu'il y ait suffisament de motards assez expérimentés pour être capable de regarder ailleurs que là où ils veulent faire passer la moto. En effet, il faut pouvoir surveiller les autres membres du groupe de temps en temps, et quelquefois (très rarement), il peut être utile que deux motards se mettent à la même hauteur pour échanger quelques mots (à vitesse réduite mais sans s'arrêter).
Rouler en quinconce permet d'augmenter le niveau de sécurité. En effet, en cas de besoin, on peut se mettre à côté de la moto qui précède. Ce n'est absolument pas une raison pour réduire les distances de sécurité. La distance de sécurité se détermine en fonction de la moto qui vous précède immédiatement, pas de celle qui est devant vous sur le même côté de la voie. Vous devez considérer que la moto qui vous précède occupe toute la largeur de la voie, pas qu'elle vous laisse de la place. En effet, le motard qui vous précède doit pouvoir se décaler pour éviter un nid de poule, prendre une trajectoire, ou éviter une voiture qui empiète sur la voie. L'espace supplémentaire offert par la quinconce ne sert qu'à deux choses: offrir une meilleure visibilité, et garantir une large distance de sécurité en cas de freinage d'urgence. De votre côté, il n'est pas impératif de conserver la quinconce. Si vous devez éviter quelque chose, n'hésitez pas à changer de côté temporairement. Par contre, ne le faites pas sans nécessité, c'est une question de courtoisie vis-à-vis du motard qui vous suit (quand vous changez de côté, vous limitez sa vision, et vous l'obligez à un surcroît de concentration, donc de stress et de fatigue). Dans le cas d'un freinage d'urgence, il est par contre impératif de ne pas se décaler. Le motard qui vous suit s'est peut-être fait surprendre et il aura alors réellement besoin de l'espace à côté de vous. Pour se décaler lors d'un freinage d'urgence, il faut y être absolument obligé (pour éviter une voiture par exemple). Sinon, vous prenez inutilement le risque de vous faire rentrer dans le derrière. La file indienne est généralement à proscrire. On peut cependant la préférer à la quinconce sur les routes viroleuses (nécessitant de prendre des trajectoires), quand il y a suffisament peu de traffic pour y rouler à allure relativement soutenue. Mais on n'emploie la file indienne qu'à la condition expresse d'avoir de larges distances de sécurité entre chaque moto.
En ville, quand la vitesse est très faible, on peut réduire les distances de sécurité, en les calculant en fonction de la moto qui emprunte le même côté de la file. Il reste cependant interdit d'empiéter sur l'espace libre à côté de la moto qui précède (sauf à l'arrêt bien sûr, mais cela implique de ne pas tous démarrer en même temps quand le feu passe au vert). Réduire les distances de sécurité oblige tout le monde à un supplément de concentration, mais en contrepartie, cela aide à conserver le groupe entier (plus le groupe est compact, moins il a de chances d'être coupé en deux par un feu rouge). Quand le groupe est petit (5 ou 6 motos), on peut jouer à l'élastique sur les grands boulevards avec peu de feux: distances de sécurité plus importantes entre les feux, quand la vitesse est relativement élevée, et plus faible à l'approche des feux. Cela implique que le meneur du groupe ralentisse à l'approche d'un feu vert, et que les derniers motards assument un stress supplémentaire en accélérant pour recoller au groupe quand le meneur vient de passer un feu vert, pour éviter qu'il ne passe au rouge avant leur passage. Ce n'est pas à la portée des débutants, et n'est envisageable que pour traverser une petite ville (sinon, ça devient trop fatigant et le risque est trop grand).
Sur route ou autoroute, augmenter les distances de sécurité permet de diminuer le stress. Cela permet de profiter du paysage et de limiter la fatigue. A l'opposé, les réduire facilite la conservation de l'unité du groupe, avec un stress plus important. Il ne faut jamais rouler longtemps avec des distances de sécurité réduites, même sur autoroute où le risque de freinage est faible. Cela entraîne à la longue un effet de fascination sur le feu arrière du motard qui vous précède, qui peut vous empêcher de voir un danger à temps. En cas de freinage violent en tête de groupe, on risque le carambolage. Ce phénomène de fascination est beaucoup plus prononcé de nuit, mais il existe aussi de jour. Ne le négligez pas, et forcez vous à regarder régulièrement autre chose que la moto qui est devant vous.
Dans l'idéal, il ne faudrait rouler en groupe qu'entre motards expérimentés qui se connaissent bien entre eux. En pratique, ce n'est quasiment jamais le cas. Il y a toujours au moins un débutant, ou au moins un motard qui n'a pas l'habitude de rouler avec les autres. Le cas du débutant est le plus délicat. Il est préférable de l'entourer de deux motards expérimentés ayant l'expérience du groupe, chargés de protéger le débutant. Celui qui précède devra éviter de semer le débutant, pour qu'il ne soit pas tenté de "forcer son talent", il lui suffira de rouler un peu plus vite dès qu'il y aura une ligne droite bien dégagée pour raccrocher le groupe, et si l'occasion ne se présente pas, le meneur du groupe devra en tenir compte et ralentir. Il devra aussi veiller à calculer ses dépassements afin que le débutant puisse lui emboîter le pas systématiquement (ceci n'oblige pas le débutant à dépasser s'il ne "sent" pas la manoeuvre, c'est au contraire pour lui éviter de se trouver limite s'il emboîte le pas machinalement). Le motard qui suit le débutant veillera aussi à sa sécurité, en restant assez proche pour éviter qu'une voiture ou un autre motard ne vienne se mettre entre eux, et éventuellement lui sucer la roue (ce qui est toujours inquiétant, surtout pour un novice). Sur autoroute ou 4 voies, il devra aussi déboiter avant le débutant pour lui faciliter le passage, et ainsi limiter les contrôles avant dépassement du débutant. Ainsi, le débutant sera "assisté", ce qui limitera son stress et sa fatigue, afin de lui permettre de rouler en sécurité sur des trajets plus longs que ceux dont il a l'habitude quand il est seul. Dans le cas où il y aurait plusieurs débutants, il est préférable d'intercaler entre eux des motards expérimentés, pour éviter que certains suivent l'exemple plus ou moins mauvais d'un autre débutant qui est devant lui.
Le cas du motard expérimenté qui ne connait pas le groupe est plus facile à gérer. Il suffit de le mettre en seconde position, juste derrière le meneur du groupe. Dans tous les cas où il y a des non-habitués au groupe ou des débutants, la consigne doit être que personne ne change de place, sauf nécessité absolue (par exemple, si quelqu'un tombe en panne, la moto balai peut remonter pour arrêter le meneur, si ce type de comportement a été défini au départ). Notez qu'il y a des techniques de roulage en groupe qui n'obligent jamais à changer les positions, quelles que soient les circonstances. Nous verrons cela un peu plus loin.
Le meneur du groupe doit-il rouler à gauche ou à droite de sa file ? Il n'y a pas de règle absolue, cela dépend des circonstances. Néanmoins, dans la plupart des cas, il roulera de préférence à gauche, prêt à entamer un dépassement. Par contre, si le rythme du groupe est lent et qu'il est plus probable que le groupe soit dépassé par les voitures que le contraire, il pourra rouler à droite, à son choix. C'est également possible sur autoroute déserte. L'idée est la suivante: beaucoup de manoeuvres obligent un motard à se décaler vers la gauche (dépassement, tourner à gauche). Si le motard de tête roule à droite de sa file, la moindre préparation de dépassement va inverser la quinconce, ce qui amène un flottement dans la totalité du groupe, ce qui n'est pas souhaitable à un moment où précisément tout le monde doit ralentir (avant de dépasser ou de tourner à gauche). Le motard de tête peut donc rouler à droite, mais seulement s'il estime qu'il va pouvoir conserver cette position pendant pas mal de kilomètres, ce qui est rarement le cas. Dans le doute, il vaut mieux qu'il roule toujours à gauche.
En matière de signalisation, il arrive que certaines motos du groupe soient dépourvues de clignotants (ou aient des clignotants quasi-invisibles). Ces motos ne doivent être placées ni en tête de groupe, ni en queue, ni devant un débutant. Il ne doit pas non plus y en avoir deux qui se suivent, au risque de rendre invisible un changement de direction à la queue du groupe. En cas d'ampoules grillées (ça peut arriver), on observe les mêmes règles, on ne met pas un code grillé en tête de groupe, ni un feu arrière grillé en queue ou devant un débutant. Si certaines motos disposent de warnings, il est préférable d'en mettre une en queue, surtout la nuit, au cas où il serait nécessaire de s'arrêter au bord d'une route (panne par exemple), ou en cas de gros ralentissement sur l'autoroute. Comme l'expérience montre que la plupart des motos avec warnings sont à la fois puissantes et pilotées par des motards expérimentés, cela ne doit pas poser de problèmes (le motard balai doit être rompu à la conduite en groupe).
Les signes qu'on peut employer sont nombreux. Les appels de phares ne doivent être destinés qu'à attirer l'attention du motard qui précède (pour engueuler quelqu'un qui arrive en face en pleins phares, c'est au motard de tête de s'en charger, et à lui seul). Par exemple, on peut employer les appels de phares si on s'apprête à doubler un autre membre du groupe (car c'est une manoeuvre inhabituelle, normalement proscrite dans un groupe). Si on s'est mis d'accord auparavant, un bref appel de phare peut indiquer de nuit au motard qui précède qu'il peut déboîter devant vous (vous le protégez, et ainsi il est sûr que ce n'est pas une moto extérieure au groupe qui va le dépasser). Des appels répétés et insistants veulent dire que vous allez doubler. De jour, on peut employer des signaux manuels, pour indiquer qu'on souhaite inverser la position avec le motard qui vous précède, ou qu'on veut se laisser dépasser, ou entraîner quelqu'un derrière soi quand on dépasse et qu'on sait qu'il peut suivre sans danger alors qu'il manque de visibilité (cas de certains virages à droite). On peut aussi signaler à quelqu'un qu'il a oublié de mettre son phare (poing fermé et ouvert plusieurs fois), de ralentir (main à plat de bas en haut), qu'on a presque plus d'essence (pouce désignant le réservoir), etc. Normalement, les signaux manuels sont inutiles pour rouler en groupe. La preuve, la nuit ils sont inutilisables et ça n'empêche pas de rouler. C'est juste une aide ponctuelle dans certains cas exceptionnels.
Pour dépasser une file de voiture tout en restant groupé (cas fréquent sur nationale chargée), il existe une procédure stricte (c'est presque une cérémonie) qui permet de le faire en toute sécurité. Le premier effectue son dépassement. Jamais plus de 2 ou 3 voitures à la fois, mais en général une seule. Toujours une seule s'il y a des motards débutants dans le groupe. Après avoir dépassé, il se rabat bien à droite, afin de laisser une place moto à côté de lui au second du groupe. Quand le second est arrivé (éventuellement à côté du premier s'il n'y a pas la place pour 2 motos + les distances de sécurité entre les voitures et chacune des motos), on marque un temps d'arrêt, le temps nécessaire pour que de l'espace se crée entre les voitures. Pendant ce temps, le second motard se laisse distancer légèrement par le premier, ce qui aide à créer l'espace vital. A ce moment, on "croise": le premier motard se décale vers la gauche pour préparer le dépassement suivant. Le second se décale vers la droite pour rester en quinconce. Le premier motard double à nouveau. Le second reste à droite sans chercher à doubler rapidement. Il ne doit pas encore se rapprocher de la voiture qu'il suit au cas où le premier devrait renoncer au dépassement. A ce moment, dès que le troisième motard (toujours derrière) voit le premier déboîter, il double à son tour, et se rabat à côté du deuxième. Les motards 2 et 3 se retrouvent en situation familière, procèdent au croisement, le second motard peut alors rejoindre le premier qui l'attend, pendant que le quatrième rejoint le troisième. etc, etc. Cette technique éprouvée permet de faire progresser relativement rapidement un groupe, sans créer de problèmes de sécurité. On perd du temps car chaque motard ne double qu'une fois sur deux, mais c'est beaucoup plus sur que si chacun doit faire son trou, derrière des voitures qui freinent pour laisser la place au motard de devant. Les deux premiers motards doivent être les plus expérimentés, les plus sages aussi, et tenir compte des accélérations de la machine la moins puissante qui les suit (afin d'éviter autant que possible de devoir renoncer à un dépassement engagé). Ainsi, les motards de numéro impair peuvent tous doubler en même temps, les motards pairs doublent également tous en même temps. Chacun doit simplement tenir sa place dans le cortège et respecter le protocole. Par contre, par signe, deux motards ensemble dans le même trou peuvent facilement échanger leurs places (pair ou impair) d'un simple signe. Il suffit de ne pas croiser. Cela permet de se laisser dériver en queue ou de remonter le groupe pour passer un message au premier (genre: on doit s'arrêter à la prochaine station). Il est utile également de relayer de temps à autre le premier motard du groupe, car c'est lui qui assume la plus grosse tension nerveuse parce qu'il a la lourde tâche de créer les trous entre les voitures, chose que les autres n'ont pas à faire car ils sont toujours certains de trouver une place toute chaude qui les attend. Dans ce schéma, seuls les deux premiers motards décident des dépassement, les autres n'ont qu'à suivre, ce qui est reposant nerveusement. Bon, ça ne dispense pas de juger soi-même si un dépassement est encore possible, ce qui peut varier, surtout pour les derniers. Il est également utile de mettre en queue un motard expérimenté avec une machine puissante pour qu'il puisse servir de moto-balai. Ainsi, il pourra remonter rapidement tout le groupe pour faire s'arrêter le premier.
Quand la circulation est peu chargée, on peut doubler de façon moins réglée. Dans ce cas, si le motard qui double estime qu'il est seul à pouvoir doubler, et qu'il ne faut pas le suivre, il reste à droite de la file de gauche, afin de pouvoir se rabattre plus rapidement une fois son dépassement terminé. Le motard suivant n'entamera pas son dépassement à la suite, et ne sera pas non plus tenté de le faire faute de visibilité. Par contre, s'il n'y a rien en face, le premier motard qui dépasse se décalera complètement à gauche, ce qui ne le met pas en danger puisqu'il a tout son temps, mais permet au motard suivant d'obtenir une visibilité totale sur ce qui arrive en face, et ainsi l'inciter à dépasser dans la foulée si c'est possible. On peut ainsi dépasser par groupes de deux, parfois trois ou quatre quand les conditions sont idéales (mais uniquement avec des motards expérimentés qui ont l'habitude de faire cette manoeuvre ensemble). Dans ce schéma, il est particulièrement important que chaque débutant soit précédé et suivi par deux motards expérimentés. Ce type de signe n'a pas besoin d'être connu de tous les membres du groupe pour être employé; il est explicite car basé sur la visibilité laissée ou non au motard suivant, car quand on ne voit pas devant, on ne double pas, c'est bien connu. Néanmoins, il est impossible de suivre dans un dépassement un motard qui reste toujours à droite de la file de gauche, ce qui fait perdre un peu de temps.
Pour dépasser sur autoroute ou sur 2x2 voies, il y a plusieurs techniques. Si le groupe est petit, extrêmement discipliné, on peut éventuellement utiliser la technique des bikers américains. C'est le dernier motard du groupe qui déboîte le premier, occupant la file de gauche pour que tous les motards du groupe déboîtent en même temps. C'est rarement utilisable, et il faut bien le dire assez peu adapté au traffic européen. De plus, les groupes de bikers américains sont souvent équipés de CB, et ils parlent tous entre eux pour se mettre d'accord. Cette technique est à employer chez nous par sous-groupes de deux: un motard débutant suivi par un motard expérimenté. Le motard expérimenté va anticiper le changement de file du débutant, se décaler avec le cligno à gauche, et donner un bref appel de phare pour indiquer au débutant qu'il peut déboîter sans risque. On l'emploiera donc uniquement dans ce but de protection. Pour le reste, le groupe déboîtera en "chenille", sans forcer le passage (une ou plusieurs voitures qui dépassent aussi peuvent s'intercaler temporairement au milieu du groupe). Il est important de conserver la formation en quinconce quand le groupe est sur la file de gauche. Le meneur du groupe se permettra de monopoliser un peu plus la file de gauche que s'il roulait seul, afin d'éviter que la chenille ne soit en permanence en train de changer de file, car cette manoeuvre augmente le stress de chacun. Cela ne veut pas dire qu'il faut rester tout le temps à gauche, simplement qu'il ne faut pas se rabattre devant une voiture si on voit qu'il y en a une autre à doubler un peu plus loin. Dans ce schéma, les motards suivis de débutants devront se rabattre loin devant le véhicule qu'ils viennent de doubler, car beaucoup de débutants sont tentés de changer de file en même temps que le motard qu'ils suivent, au risque de faire une queue de poisson à la voiture qu'ils viennent de dépasser. C'est encore une forme de protection.
D'une façon générale, soyez gracieux. Faites en sorte que la progression du groupe soit agréable à regarder. Grâce et Harmonie sont les mamelles de la conduite en groupe. Ca parait curieux dit comme ça, mais c'est beaucoup plus important qu'il n'y parait au premier abord. Pour obtenir cet "effet", il faut rouler sans brutalité, régulièrement espacés et sans grandes variations d'allure. Les motards expérimentés, régulièrement répartis dans le groupe, sont garants de cette harmonie, en n'effectuant que des manoeuvres parfaitement logiques et prévisibles par ceux qui les suivent. Si vous parvenez à rouler en groupe de cette façon, cela signifie que toutes les manoeuvres sont connues et comprises de tous. Qu'aucun comportement n'entraîne de surprise, et que la discipline règne. Cela permet aussi de forger plus rapidement l'expérience des débutants, qui suivront ainsi un bon exemple. Cette "beauté du geste", purement gratuite en apparence, est en réalité la garantie d'un très haut niveau de sécurité, d'un stress réduit pour chaque motard du groupe, et donc d'une fatigue nerveuse minimale, même à allure soutenue et/ou sur longs trajets. Notez que cette harmonie est impossible à obtenir quand les distances de sécurité ne sont pas respectées, que la quinconce est approximative, et que les arsouilleurs ne pensent qu'à en découdre, toutes choses qui mettent la sécurité du groupe en péril. Autre avantage, si une moto est équipée d'une caméra embarquée, ça fera un film superbe dans les petites routes de montagne ! ;-))
Dernier point: comment ne perdre personne. Ceux qui ont emmené des groupes importants savent à quel point c'est difficile, combien sont nombreuses les occasions de perdre quelqu'un. On va dire qu'il existe deux familles de techniques. Les techniques de roulage "a vue", et les techniques d'orientation "sans visibilité". Dans le premier cas, on essayera de conserver tous les motards en vue les uns des autres (chaque motard doit voir au moins celui qui le précède et celui qui le suit). C'est ce qui demande le moins d'organisation préalable, mais le plus d'attention quand on roule. Les techniques "sans visibilité" reposent sur un organisation stricte du voyage, avec des procédures qui doivent être connues de tous les membres du groupe, sans aucune exception.
Pour rouler "à vue", il existe une technique simple et efficace. Celui qui ne voit plus le motard suivant s'arrête. Celui qui le précède finira bien par s'apercevoir de son absence, et s'arrêtera aussi, et ainsi de suite jusqu'au meneur du groupe. C'est la technique de base. Dans la pratique, celui qui s'aperçoit que la queue du groupe s'est arrêtée met son cligno à droite et fait des appels de phares pour indiquer le problème, et tout le début du groupe s'arrête ensemble dès que possible. Ainsi, on reste toujours en vue, même si le groupe est séparé par un feu rouge. Attention, il y a un cas qui peut poser problème, c'est quand un motard étranger au groupe s'intercale au milieu. C'est rare (en général, si un motard double les derniers, c'est qu'il roule plus vite que tout le monde, donc qu'il va dépasser tout le groupe), mais ça peut arriver, en particulier quand on sort d'une ville qu'on vient de traverser (certains motards vont s'immiscer dans le groupe à l'intérieur de la ville, et une fois sorti vont rouler au même rythme que vous). Il sera difficile de faire la différence entre un membre du groupe et un autre motard qui roule à la même vitesse que le groupe, surtout la nuit. Pour éviter ce genre de problème, il est impératif que le motard balai connaisse le parcours, et soit capable de mener à bon port une queue de groupe décrochée à cause de ça.
Pour les techniques sans visibilité, il y en a plusieurs possibles. On peut rouler en sous-groupes réduits avec dans chaque sous-groupe un meneur qui est au courant de la totalité du trajet, des points de rendez-vous et des haltes prévues par les autres (tous les sous-groupes n'ont pas forcément la même autonomie, il peut y avoir un sous-groupe de GT et un sous-groupe de customs par exemple). Chaque meneur de sous-groupe est alors responsable de la cohérence de son équipe et roule "à vue".
On peut aussi rouler en individuel, avec la directive TDSRP (tout droit sur route principale). A chaque changement de direction, on attend que le motard suivant soit en vue avant de repartir dans la bonne direction. A charge pour ce motard de s'arrêter pour attendre le suivant, et ainsi de suite jusqu'au motard balais. En cas de doute sur ce que signifie "tout droit" (cas d'une fourche ambigüe, ou d'une intersection entre route principale qui tourne avec une route secondaire qui va tout droit par exemple), il suffit de s'arrêter. Au bout d'un certain temps, le motard précédent fera demi-tour pour venir vous chercher. Ce type d'organisation est efficace, chacun peut rouler à son rythme, mais en cas de problème (panne par exemple), il fera perdre beaucoup de temps, car les motards ayant dépassé le point où s'est produit le problème auront peut-être énormément de kilomètres à faire pour revenir, ce qui peut être très problématique sur autoroute, surtout si personne n'a de téléphone portable. Ce n'est donc pas une technique à recommander dans l'absolu. On peut cependant se servir de la directive TDSRP pour que certains arsouilleurs aient de temps en temps la possibilité de lâcher le reste du groupe quand le poignet droit les démange.
On peut imaginer d'autres possibilités, mais en général, le plus agréable est de rouler réellement en groupe, donc "à vue". Quand le groupe est trop important pour être gérable, il est préférable de le scinder en deux ou plusieurs sous-groupes roulant à vue, avec des points de rendez-vous prédéfinis, et au moins un téléphone portable par sous-groupe. Chaque meneur de groupe doit alors connaître parfaitement l'itinéraire et les points de rendez-vous. Dans ce schéma, il n'est pas inutile de répartir aussi les secouristes et les mécaniciens entre les différents sous-groupes, le cas échéant. Le plus important étant de faire des sous-groupes homogènes en termes de performances et de tempéraments (on évitera de mettre un débutant en 125 dans le groupe des pilotes professionnels en sportives full power ;-) ).
C'est à peu près tout ce qu'il y a à savoir. Pour le reste, c'est l'expérience qui vous l'apprendra. Plus on roule en groupe, mieux on sait le faire. Alors n'hésitez plus, partez faire des balades avec d'autres motards. Contentez vous simplement de rouler tranquillement, sans jamais arsouiller, du moins avant de connaître parfaitement vos compagnons de route et vous être forgé de solides habitudes, fruits d'une longue pratique de la conduite en groupe.
Points "douteux"
J'emploie le mot "douteux" pour vouloir dire qu'il y a des doutes, c'est à dire des alternatives, différentes manières de faire. Pas pour dire que c'est nul dans l'absolu. Donc, à vous de voir, et de trouver les techniques qui vous conviennent.
- Regarder la roue avant gauche d'une voiture qu'on dépasse: cela permet de voir que la voiture va tourner un peu avant que ladite voiture n'ait changé de trajectoire. C'est toujours bon de pouvoir anticiper. L'inconvénient, c'est que comme vous êtes près, il faut diriger le regard vers la roue, ce qui fait perdre la visibilité vers l'avant. Jeter un coup d'oeil ne suffit pas, la loi de Murphy disant que la voiture tournera quand vous ne regarderez pas sa roue. Personnellement je ne le fais pas, je préfère passer loin à gauche. Je ne le fais pas non plus entre les files. Je préfère doubler rapidement, quitte à freiner juste après. Par contre, c'est utile de le faire quand on est arrêté dans l'angle mort d'une voiture au feu. Certains prévoient un changement de file au moment du démarrage, et commencent à braquer à l'arrêt.
- Quand un caisseux vous suit à grande vitesse à 10 cms de votre plaque, comment s'en débarrasser ? Le coup classique, c'est deux ou trois petits coups de freins histoire de faire s'allumer le feu stop. En général, ça suffit et l'autre prend ses distances. Bon, des fois ça marche pas. Une chose faisable, c'est de prendre l'air du "motard bourré". Trajectoire vaguement imprécise, un pied glisse du cale pied, et il faut bien s'y reprendre à deux ou trois fois pour le remettre, prendre l'air avachi légèrement d'un côté, se décaler légèrement sur sa file et sursauter en rectifiant la trajectoire. Toutes ces manoeuvres doivent être effectuées sans excès, il ne faut pas se mettre en danger, et bien sûr toujours faire attention à ce qui se passe devant, on ne sait jamais. Ainsi, celui qui suit de près a peur que vous alliez vous crasher juste devant lui, et bousiller sa précieuse caisse. Là, il va prendre une distance de sécurité considérable.
Comment bien freiner
Au freinage, c'est parfois un problème de ne pas lever la roue arrière avec les motos modernes. Frein avant énorme sur une brèle courte et relativement haute (pour augmenter la garde au sol, donc les possibilités d'angle sans frotter). Autrefois, les machines étaient plus longues et un peu plus basses. Les très gros calibres genre CBR 1100 ou Hayabusa sont des motos longues et relativement basses, moins sujettes au lever de roue arrière (les BM aussi d'ailleurs). Elles ne posent que le problème du dribble de la roue arrière (beaucoup moins grave), et l'équilibre de la force de freinage entre avant et arrière est beaucoup plus facile à trouver d'instinct. Par contre, les sportives moyennes (600 à 900) sont hyper courtes, assez hautes, ce qui est aussi le cas des roadsters. Ca donne une super maniabilité, une direction légère, au prix d'un problème de stabilité au freinage. On peut compenser en chargeant l'arrière (passager, valises, à la rigueur top case mais ça le fait moins), mais on perd ainsi le poids sur l'avant (guidonnages, instabilité, manque de maniabilité). Bref, les motos modernes ne facilitent pas le freinage d'urgence. Il faut donc trouver une méthode sûre.
-Parallèlement à ce raccourcissement des empattements, on a vu évoluer les pneus dans le sens d'un élargissement. Contrairement à ce qu'on peut croire, malgré un freinage appuyé de l'avant, un pneu de 180 à l'arrière permet de freiner vraiment fort, du fait de la surface en contact avec le sol et la
qualité des gommes modernes. Donc, il faut apprendre à freiner en fonction de sa moto. Freinez un peu moins de l'avant pour toujours garder la roue arrière en contact avec le sol, et servez-vous assez franchement du frein arrière. Ceci complété par un bon réglage de l'amortisseur arrière pour éviter les dribbles, vous pourrez vous arrêter beaucoup plus court qu'en levant la roue arrière. D'ailleurs, notez que dès que l'arrière à décollé, le centre de gravité se déplace vers le haut et un peu vers l'avant, donc vous devez obligatoirement réduire le freinage si vous ne voulez pas vous retourner. Lever la roue arrière cause donc un allongement de la distance de freinage, contrairement à la sensation de "freinage maximum" qu'on peut ressentir à ce moment là. De plus, le frein arrière a tendance à rabaisser la moto (c'est dû à l'angle formé par le bras oscillant avec l'horizontale, qui joue un rôle anti-plongée). Plus la moto est basse, c'est à dire plus on freine fort de l'arrière, plus on peut freiner fort de l'avant sans risquer de lever l'arrière. C'est en partie pour cela qu'on ne doit pas se jeter sur le frein avant comme un malade, contrairement au frein arrière, mais le serrer progressivement, le temps (court) que la moto trouve son nouvel équilibre et se tasse sur ses suspensions.
-A basse vitesse, on peut freiner fort avec uniquement le frein arrière, et un blocage de l'arrière à très basse vitesse n'est pas bien gênant. Alors qu'un blocage de l'avant ne laisse pas le temps de rattraper la moto quand on roule à moins de 60 km/h. Donc, à très basse vitesse, surtout en courbe, privilégier l'arrière, alors qu'à haute vitesse, il faut privilégier l'avant.
Une fois cela compris, c'est une question d'entrainement pour répartir au mieux la force de freinage entre la roue avant et la roue arrière pour avoir la meilleure distance d'arrêt. Entrainement sur circuit obligatoire (où à la rigueur sur route vraiment déserte, mais alors vraiment, et en surveillant ses rétros toutes les 10 secondes). Désolé, mais je ne peux pas expliquer quelle force appliquer sur le levier et la pédale. Ca fait partie de l'expérience du motard.
-Un bon indicateur de la qualité de vos freinages est l'usure de vos plaquettes. Avec une machine classique (double disque avant, simple disque arrière), vous devez user vos 2 jeux de plaquettes avant à peu près dans le même temps que le jeu de plaquettes arrière (un peu plus vite quand même). Vous userez plus vite l'avant sur route, plus vite l'arrière en ville. C'est une moyenne, et ça peut varier pas mal d'une machine à l'autre, et selon l'usage (en duo, on doit utiliser beaucoup plus le frein arrière par exemple). Mais si vous changez les plaquettes avant 3 ou 4 fois plus souvent que les plaquettes arrières, entrainez-vous à freiner plus fort de l'arrière. Et inversement si vous bouffez les plaquettes arrières beaucoup plus vite que l'avant. Si vous avez un simple disque avant par contre, comptez environ 3 jeux de plaquettes pour un seul jeu à l'arrière. Il est impossible de donner des proportions précises, parce que ça peut varier pas mal selon les machines, mais ça vous donne au moins une idée. Comparez avec d'autres motards ayant la même moto que vous.
J'ai gardé le meilleur pour la fin: comment bien arsouiller !
-Lors d'une arsouille, le vrai plaisir c'est de se dépasser. Pas d'arriver premier. Pour commencer, ne faites que des arsouilles à deux. Si vous êtes devant, laissez volontairement un trou pour que l'"adversaire" puisse vous passer. Ne bouchonnez jamais. Ne le passez que s'il laisse un trou. Le principe est de ne jamais forcer le passage.
-Ne roulez jamais plus vite que si vous étiez seul, et même un poil moins vite, pour laisser à l'autre la possibilité de vous dépasser. Sachez arrêter d'accélérer quand vous êtes devant, et optez pour une vitesse raisonnable, laissant la possibilité à l'autre de vous dépasser sans danger. Si vous voyez un danger devant, faites un signe indiquant à l'autre d'aller moins vite et de ne pas doubler. La sécurité de tous est en jeu. Il suffit de lever la main gauche pour faire ce signe.
-Surtout, ne jouez pas au petit jeu du "j'accélère, je double, je ralentis pas, je me fais doubler, j'accélère, etc". Avec des machines puissantes, on a vite fait de rouler à plus de 200 en ville ou sur des petites routes. C'est ça le vrai danger.
-Donnez vous une règle à l'avance. Les motards expérimentés la connaissent: si le motard devant vous est à gauche de sa file, ne le doublez pas. C'est qu'il va doubler. S'il est à droite, vous avez son autorisation. Cette règle permet de ne pas être surpris quand on arsouille à plus de deux. Faites très attention aux rétros quand vous passez de la partie droite à la partie gauche de la file.
-En cas de fatigue ou de densité importante de véhicule, sachez arrêter. C'est devenu trop dangereux, vous remettrez la suite à plus tard.
-N'arsouillez pas en grand nombre. Une arsouille est très sympa à 4 ou 5 maxi, et très stressante à 10 ou 12, parce que le danger augmente de façon exponentielle avec le nombre de participants.
-N'arsouillez pas si vous ne connaissez pas la route, ou alors très lentement, genre lopette. Surtout en montagne ou en ville, et sur les petites routes de campagne. Pour ces routes, vous devez connaître parfaitement chaque virage, chaque nid de poule, chaque gravillon, ou en ville chaque coin de rue pavé.
Avec ces règles simples, vous pourrez arsouiller avec d'autres motards raisonnables sur route ouverte, pas trop vite, et en y prenant plaisir. Parce que doubler souvent, accumuler les accélérations et freinages lors des dépassements, c'est ça le vrai plaisir de la bourre.
Ces techniques ne permettent pas de travailler vos trajectoires ni vos points de freinage. Pour cela, il y a les circuits. Les vieux arsouilleurs n'appliquent pas ces règles, ils sont prêts à toute éventualité et savent s'éviter en toute circonstance. Attendez d'être un vrai pilote pour arsouiller "n'importe comment" sur route ouverte.
Publication originale par Georges, Jungle Biker
