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Peintures autour de Shin Saimdang

  • Par Zadie
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Installation pour l'exposition "Saimdang, Son Jardin" , Musée de Séoul dans le quartier de Buam-dong

J'avais envie depuis quelques mois d'ouvrir une section Art afin de nous cultiver 
et afin qu'on découvre plus sur les arts asiatiques que les temples, les vêtements, la
nourriture et la Kpop. Prise par ma vie personnelle et n'ayant trouvé personne pour
tenter l'aventure à mes côtés, j'ai attendu d'avoir quelques instants de tranquillité
et on n'est jamais aussi bien servi que par soi-même, n'est-ce pas ? :)

Saimdang sera ma première muse pour ouvrir cette section afin
de découvrir quelques personnages historiques intéressants.

Le drama Saimdang, Light's diary est une belle fiction poétique qui nous fait voyager dans le temps, entre Italie et Corée du Sud et qui regorge de clins d’œil historiques. Si le drama ne retrace pas réellement une histoire d'amour vérifiée, ni ne met en valeur que de véritables œuvres, le drama donne envie de découvrir plus sur les œuvres qui ont inspiré ce drama. Il y aura un peu du vrai, un peu du faux, un parfait mélange pour nous faire rêver devant les coups de pinceaux de Saimdang et Ahn Gyeon (personnages du drama).

 

Shin Saimdang: femme, mère, poète, peintre, calligraphe (1504 – 1551)

 

Shin Saimdang a été une femme exceptionnelle à l'époque mi-Joseon de domination masculine tant dans l'Art que dans la vie politique et quotidienne. Elle ne fut donc pas seulement célèbre à cette époque pour ses peintures mais pour la réussite de son fils, Yi I, qui a été premier aux  9 examens supérieurs d'officier civil à un jeune âge (15ans)  et qui est considéré comme l'un des deux plus grands savants de cette époque  et qui a influencé le néo-confucianisme. Elle est aussi connue pour être la fille de Shin Myeong-hwa (un érudit) et l'épouse de Yi Won-su, un membre du Gouvernement de l'époque.

Dans le drama, on retrouve cette distinction familiale bien qu'assimilée à une époque de purge pour son père et présentée comme fille unique, ce qui n'était pas le cas dans la réalité. Elle enfanta 7 garçons et filles (4 dans le drama). Lorsqu'elle s'est mariée, elle n'est pas partie vivre tout de suite avec son mari mais celui-ci vint habiter chez elle avant de partir plus tard à Séoul avec les enfants. Cette transition dans sa vie lui inspira un célèbre poème :

유 대관령 망 친정

늙 으신 어머님 을 고향 에 두고 
외로이 서울 로 가는 이 마음 
이따금 머리 들어 북촌 을 바라 보니 
흰 구름 떠 있는 곳 저녁 산만 푸르네

Regarder en arrière la maison de mes parents en passant par Daegwallyŏng

Je laisse ma mère âgée derrière à Gangneung 
Anéantie par les émotions, je suis seule sur la route de Séoul. 
Je regarde en arrière mon chez moi et, un moment, je garde espoir. 
Les nuages ​​blancs forment un voile et enveloppent la montagne verte au-dessous.

Ses peintures ont pour modèles les "herbes et insectes" (on parle du style Chochungdo) et sont célèbres à cette époque pour être très vivantes. Shin Saimdang était surtout douée pour peindre les changements de saisons.  Une de ses œuvres représente des cerises au sol, des dendranthema, des roseaux et une libellule rouge. Ces éléments apparaissent tous au début de l'automne. C'était aussi l'époque des peintures symboliques où il ne fallait pas peindre de mauvais présages ou des choses qui pouvaient déplaire au Roi et vous conduire à la mort. Saimdang a peint un coq (poste public), trois papillons (papillon= harmonie conjugale) avec trois scarabées qui signifiaient une vie conjugale heureuse et une belle carrière gouvernementale. On peut supposer que cette peinture a été faite pour son mari.

Il a été difficile de savoir avec exactitude si certaines peintures appartenaient aussi à Saimdang car à cette époque les femmes ne signaient pas leurs œuvres...

Vous pouvez visiter la vraie maison de Shin Saimdang, Ojukheon House, à Gangneung.

Maison où a grandi Saimdang et son portrait (statue)

On retrouve aujourd'hui le portait de Saimdang sur les billets de ₩ 50,000 :


Attention, ces peintures que vous verrez dans le drama ne sont pas des œuvres existantes:

On note toutefois que ces "contrefaçons" réalisées pour la fiction sont très bien faites, surtout le faux Mont Geumgang qui est assez bluffant au niveau des traits. On est d'ailleurs fascinés tout le long du drama par différentes peintures surtout lorsqu'ils peignent à deux. Ça ajoute beaucoup d'émotions à la poésie qui se dégage de la scène.

 

Le vrai Mont Geumgang - Geumgang jeondo - 

Si pendant quelques secondes je fus assez triste de m'apercevoir que j'avais été dupée par quelques fausses peintures du drama, j'ai pu retrouver les originaux et m'émerveiller à nouveau. Lors de mes recherches, j'ai pu découvrir que le drama mêlait deux peintres sous un même nom. Astucieux si on fait un clin d'oeil à ces peintres tout en brodant une histoire personnelle autour de la vie de ces hommes mais plus perturbant pour le spectateur amateur d'art mais ignorant de ces artistes.

 

Geumgang jeondo - Mont Geumgang peint par Jeong Seon

 

Jeong Seon est un peintre (1676 – 1759) au nom d'artiste Gyeomjae. Le Mont Geumgan est considéré comme un trésor national. Au coin supérieur droit on peut y lire:

"Même si vous visitez la montagne vous-même et que vous vous promenez dans tous ses coins et recoins, comment votre plaisir peut-il être comparé à ce que vous ressentez lors de la vision de cette image depuis votre chevet/lit". 

Contrairement aux artistes coréens de l'époque qui s'inspiraient de peintures chinoises, Jeong Seon a voulu peindre son pays , ses paysages et non se concentrer sur des bureaucrates.

Là  où le spectateur s'interroge sur la base historique qui a servi à la fiction, c'est que le personnage amoureux de Saimdang (dans le drama) est un peintre du nom de tantôt: Lee Gyeom (le garde personnel et ami du Roi l'appelle ainsi) et tantôt du nom de An Gyeon.

Or le pseudonyme de Jeong Seon est Gyeomjae et il a véritablement existé un peintre du nom de Ahn Gyeon. Je doute que cela soit un hasard.

Ahn Gyeon est un peintre assez innovant de la première moitié du 15ème siècle. Connu pour son tableau Voyage de rêve au pays des fleurs de pêcher.


Tableau peint en 1447

Ce tableau a été fait à la demande du prince Anpyeong qui était également un de ses amis (tout comme dans le drama mais nom différent). La particularité de Ahn Gyeon est qu'il a fait partie du fameux "Ministère de peintures/arts" tout comme le Ahn Gyeon du drama.

On peut supposer que le drama s'inspire des deux peintres mais qu'il aurait été impossible d'imaginer une véritable relation entre l'un de ces peintres et Saimdang pour des raisons évidentes de marges temporelles. Les références restent amusantes et à la fois instructives.

 

Un clin d'oeil aussi à Rubens

Que vient faire Rubens dans l'art asiatique me demanderez-vous ? Tout simplement car le drama fait référence à deux œuvres de ce peintre . La première :


"Homme en costume coréen" de Paul Rubens


Dans le drama, sans comparaison, on préfère le beau Song Seung Heon¨(When a man falls in love): 

 

La deuxième oeuvre de Rubens qui apparaît dans le drama est celle-ci:

Les Miracles de St François Xavier par Rubens

 

Comme je vous l'ai dit, l'histoire se déroule parfois en Italie et très précisément en Toscane. Bien que l'Homme coréen (1ère photo ci-dessus de Rubens) n'ait jamais été identifié, le drama s'en inspire pour l'identifier à un des personnages de l'histoire. Sur l'autre oeuvre, l'homme en jaune qui se penche en arrière au pied de l'autel apparaît aussi comme ayant des origines asiatiques. Etait-ce un esclave ou, si nous laissons libre cours à notre imagination, était-ce un roi, un prince, un amoureux criminel fuyant ou un peintre ? ;)

 

J'espère que vous pourrez encore plus apprécier ce drama avec ce complément d'informations et avec un regard artistique. :)  La critique de ce drama viendra les jours prochains, à mon rythme, carpe diem !

Pour finir, quelques peintures de Saimdang:

 


 

Les sources de l'article (oui ça en fait quand on fouille ! ) et pour plus d'informations pour les bilingues:

http://www.koreatimes.co.kr/www/art/2017/03/691_225097.html

http://chosonkorea.org/index.php/people/women/shin-saimdang-and-her-paintings

http://www.korea.net/NewsFocus/Culture/view?articleId=143989

http://english.visitkorea.or.kr/enu/ATR/SI_EN_3_6.jsp?cid=2400793

http://higashishinbun.blogspot.fr/2012/06/same-subject-dissimilar-paintbrushes_23.html

http://world.kbs.co.kr/english/archive/program/program_koreanstory.htm?no=29957

http://www.metmuseum.org/toah/hd/mowa/hd_mowa.htm


Zadie
Zadie

“Mon passe-temps favori, c’est laisser passer le temps, avoir du temps, prendre son temps, perdre son temps, vivre à contretemps." - Françoise SAGAN

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