Main photo Spirit's Homecoming

Spirit's Homecoming

  • Par Admin
  • 1809 vues

Titre Original : Gwi-hyang
Pays : Corée du Sud
Date de sortie : 25 mars 2016
Réalisateur : Cho Jung-Rae  
Acteurs : Park Choong-Hwan, Park Geun-soo, Yoon Jeong-ro
Genres : Drame, Historique
Durée : 118 minutes

Synopsis

Durant la Seconde guerre mondiale, de nombreuses jeunes filles sont régulièrement violées et tuées par les soldats japonais en tant que "femmes de réconfort". Jeong Min avait 14 ans à l'époque et a été une victime également. En 1991, Eun Gyeong, son amie, qui porte aussi des cicatrices d'agression sexuelle, se rend compte qu'elle sait communiquer avec les morts. Avec une chamane, Yeong Wuk, elle décide de ramener les esprits de ces jeunes filles torturées.

Informations supplémentaires

Un film sur une page sombre de l’Histoire en tête du box office en Corée du Sud, celle de l’esclavage sexuel des femmes coréennes abusées par les troupes japonaises pendant la Seconde guerre mondiale. En l’espace d’une semaine, “Spirits’ homecoming” a enregistré plus d’un million d’entrées. Il aura fallu quatorze ans au réalisateur Cho Jung-rae pour porter à l‘écran l’histoire de l’un des ces “femmes de réconfort”, qu’il a côtoyées pendant de longs mois au sein d’un foyer, pour mener à bien son projet. Il s’est aussi inspiré du dessin “Femmes en proie aux flammes”, de Kan Il-Chul, emmenée de force à seize ans par des membres de l’armée. Son illustration montre un groupe de femmes en costume traditionnel, brûlées vives, entourées de gardes armés pour éviter qu’elles ne s‘échappent.



Malgré leur âge avancé, certaines survivantes ont pu assister à la première du film. “Ces grands-mères m’ont raconté que, si je faisais le film, je devais le faire bien pour que leurs histoires soient relatées”, explique Cho Jung-rae. “Cela a été ma plus grande motivation, et de loin”.

Faute de producteurs engagés, une campagne de financement participatif a été lancée : près de 75 000 personnes ont mis la main à la poche pour que ce film voit le jour, et nombre d’entre elles ont été touchés par le résultat. “Je ne trouve pas de mots tellement mon cœur est rempli d‘émotion”, témoigne une spectatrice, Hang Hyeon-Mi. “J’espère que le Japon présentera des excuses sincères à ces femmes”. “Ce film a été produit grâce au crowfunding, auquel j’ai participé”, indique un jeune homme, Jeang Tae-Hyun, à la sortie d’une séance, “et je trouve super de voir mon nom à l‘écran. J’espère que les gens vont continuer à aider les femmes de réconfort en s’engageant dans des activités sociales, mais aussi en se mobilisant, tant que le Japon ne se sera pas sincèrement excusé auprès d’elles”.

Si ces femmes ont été peu nombreuses à sortir de l’ombre, près de 200 000 victimes seraient à déplorer d’après les estimations des militants sud-coréens. Seules 44 d’entre elles sont toujours en vie dans le pays, sur les 238 à avoir livré leur vécu au grand jour. Le film est sorti près de deux mois après l’accord historique conclu entre les deux pays fin décembre. Un accord assorti des excuses de Tokyo, qui prévoit l’indemnisation des victimes et devait mettre un point final à ce contentieux historique, mais qui a pourtant fait l’objet de vives critiques chez une large partie de la population coréenne.



En effet, si Séoul et Tokyo sont parvenus à un accord au sujet des Sud-Coréennes forcées à se prostituer pour l’armée japonaise, les victimes n’ont pas été impliquées dans les négociations et l’opinion publique des deux pays ne semble pas prête pour une réelle réconciliation. L’accord nippo-coréen signé le 28 décembre 2015 a permis de trouver un terrain d’entente sur la question des “femmes de réconfort”, euphémisme connu pour désigner les femmes qui, durant la Seconde Guerre mondiale, ont été contraintes de se prostituer pour l’armée japonaise. La presse internationale, à commencer par la presse américaine, a relayé la signature de cet accord comme un dénouement positif permettant enfin de tourner la page. “Or il s’agit d’un compromis plus que d’une véritable résolution du problème”, écrit le Tokyo Shimbun dans son éditorial publié après l’accord. En effet, le pas n’aurait sans doute pas été franchi sans la pression que les États-Unis ont exercée sur ses deux alliés d’Asie de l’Est. “En saluant le courage des dirigeants du Japon et de la Corée du Sud, le secrétaire d’Etat John Kerry a souligné le caractère ‘définitif et irréversible’ de l’accord, de telle sorte que Séoul ne puisse plus revenir dessus”, peut-on lire dans les colonnes de l’Asahi Shimbun.

La presse sud-coréenne a été unanimement critique au sujet de cet accord, qu’elle présente comme un échec de la Maison-Bleue [résidence du président]. Depuis le 28 décembre, de nombreux manifestants continuent à se rassembler devant l’ambassade du Japon à Séoul, où se dresse la statue d’une jeune fille érigée en l’honneur des victimes. “Il n’y avait jamais eu de rassemblement d’une aussi grande envergure [depuis 1992, année où la statue a été installée]. Beaucoup de jeunes, drapeaux à la main, ont entouré la statue. Certains allaient jusqu’à brandir des propos haineux, mais personne n’intervenait”, écrit un envoyé spécial japonais du Mainichi Shimbun. “Le gouvernement coréen n’est pas encore parvenu à convaincre sa population, le plus dur reste donc à faire”, conclut-il.  



Aujourd’hui, 238 femmes ont été reconnues par le gouvernement sud-coréen en tant qu’anciennes “femmes de réconfort”; Seules 46 sont encore vivantes, avec une moyenne d’âge de 89,2 ans. Le correspondant du Mainichi Shimbun s’est rendu à la Maison de Nanum, un centre tenu par des bénévoles où cohabitent les survivantes. “Les autorités sud-coréennes ne les avaient pas consultées. Au lendemain de la signature de l’accord, un représentant du ministère sud-coréen des Affaires étrangères s’y était rendu, mais les victimes, après avoir pris connaissance du contenu, ont vivement exprimé leur désaccord”, écrit-il. Au Japon, des groupes ultranationalistes ont également manifesté devant la résidence du Premier ministre début janvier. Le président du groupe Gamabare Nippon ! Zenkoku koudou iinkai [Courage Japon ! Comité pour une action nationale] a confié au Tokyo Shimbun qu’il s’était senti trahi par Shinzo Abe, alors que le groupe a jusqu’à présent toujours soutenu le Premier ministre japonais. Le Nippon Kaigi, le lobby conservateur et révisionniste le plus influent, autre soutien de Shinzo Abe, garde pour le moment le silence.

D’une façon générale, l’opinion publique japonaise commence à estimer que le sujet est enfin clos, même si la crainte que la Corée du Sud ne remette la question sur le tapis se fait sentir. En effet, en août 2016, douze anciennes esclaves sexuelles de l'armée impériale nippone ont annoncé le dépôt d'une plainte contre Séoul. Elles reprochent à leur gouvernement d'avoir signé avec Tokyo un accord visant à mettre fin à des décennies de contentieux sur le sujet des «femmes de réconfort». Les plaignantes représentent près d'un tiers des 40 victimes survivantes. Elles reprochent au gouvernement sud-coréen d'avoir conclu en décembre 2015 un accord avec Tokyo bien que le Japon refuse de reconnaître sa responsabilité légale pour le sort qui leur avait été réservé. Selon la Fondation pour la justice et le souvenir de l'esclavage sexuel militaire, les 12 plaignantes demandent par ailleurs à un tribunal de Séoul d'ordonner au gouvernement de leur allouer chacune 100 millions de wons (80.000 euros) de dédommagements.


Publications recommandées