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L'affaire méconnue de Jean Grenier, jugé pour être un loup-garou !

  • Par Lydie
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Bordeaux : l'affaire méconnue de Jean Grenier, l'adolescent jugé pour être un loup-garou

Au 17e siècle, un adolescent a été jugé pour lycanthropie à Bordeaux. Retour sur l'affaire de Jean Grenier, l'un des derniers loups-garous condamnés en France.

Jean Grenier a été condamné pour lycanthropie en Gironde au 17e siècle. Détail d’une gravure de loup-garou de Lucas Cranach l’Ancien vers 1512. (©illustration wikimedia commons /Lucas Cranach l’Ancien vers 1512)

Au Moyen-Âge, les sorcières étaient régulièrement conduites au bûcher. Mais saviez-vous que chez les hommes, on condamnait les loups-garous ? À Bordeaux, en 1603, un procès a marqué les esprits. 

L’affaire débute du côté de Coutras, dans la région limitrophe de la Dordogne. Des enfants étaient attaqués et tués par des bêtes sauvages. Une jeune paysanne de 13 ans, prénommée Marguerite, gardait du bétail lorsqu’elle est attaquée mais elle s’échappe.

« Un jeune garçon, Jean Grenier, passe aux aveux : il a tué et mangé des chiens et des enfants, et même un nourrisson dans le berceau », explique Hubert Saint Béat, guide-conférencier bordelais.

Âgé de 13 ou 14 ans, Jean Grenier fait la taille d’un enfant de 10 ans et se comporte comme s’il en avait trois de moins. Chassé par son père car il a rompu le jeûne du carême, il a erré comme un mendiant jusqu’à trouver du travail comme gardien de bétail.

Devenu loup-garou après un pacte avec le diable 

Jean Grenier est présenté au juge : Jean Grenier affirme pouvoir se transformer en loup. Trois enfants sont témoins et confirment ses dires.

Il dit avoir rencontré le "monsieur de la forêt", un homme noir sur un cheval noir, qui lui a fait un baiser froid sur la bouche il y a trois ans. Il aurait donc fait un pacte avec le diable.

Hubert Saint BéatGuide conférencier

Jean est emmené de village en village, pour reconstituer une quinzaine d’attaques. « À chaque fois, il reconnait les lieux et les faits », souligne Hubert Saint Béat. « Il est condamné à être pendu puis brûlé » en mai 1603.

Mais le Parlement de Bordeaux annule la décision en appel. On fait venir deux médecins, pour voir ce qu’il en est. L’un d’eux affirme que Jean Grenier a tout inventé. L’autre dit que le garçon a commis ces actes en ayant eu le sentiment d’être un loup, qu’il a réellement passé un pacte avec le diable.

La décision est rendue le 6 septembre : Jean Grenier est enfermé à vie dans un couvent à Bordeaux. 

Des écrits contemporains

Deux libres sont écrits à l’époque sur le procès, et l’un des auteurs a pu échanger avec le loup-garou quelques années après le jugement. « En 1610, un magistrat rencontre Jean Grenier au couvent. Il le décrit comme honteux mais hébété, persuadé d’avoir été un loup-garou mais ne plus l’être. Le magistrat pense vraiment qu’il a été subjugué par le diable car pas instruit dans la crainte de Dieu », détaille le guide-conférencier. 

Jean Grenier a continué à marcher à quatre pattes, avait des dents longues et pointues et des ongles sales. Il meurt peu de temps après la visite du magistrat, Pierre de Lancre.

« Les habitants des campagnes sont sans doute persuadés qu’il s’agit d’un vrai loup garou, mais les élites savent dès le 17e siècle qu’un homme ne se transforme pas en loup », affirme le guide. Ils pensent que le diable peut cependant le faire croire à un individu.

Ce qui ressort dans cette enquête, c'est qu'on a voulu faire toute la lumière sur les éléments. Il y a eu des perquisitions, des reconstitutions, des interrogatoires avec torture, des confrontations entre le suspect et les victimes. On ne condamne pas comme ça.

Hubert Saint BéatGuide-conférencier bordelais

Un édit de 1682 interdit les procès et torturent pour des affaires de loups-garous en France. L’affaire de Jean Grenier est l’une des dernières bien documentées et a contribué au mythe de l’enfant loup.


Lydie
Lydie

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