Main photo S/2022/698 : Lettre datée du 15 septembre 2022, adressée au Président du Conseil

S/2022/698 : Lettre datée du 15 septembre 2022, adressée au Président du Conseil

  • Par Secrétariat
  • 998 vues

Au paragraphe 42 de la résolution 2607 (2021), le Conseil de sécurité m’a prié de lui présenter, à l’issue d’une évaluation technique des capacités de la Somalie en matière de gestion des armes et des munitions, des recommandations en vue de l es améliorer davantage. Le Conseil m’a en outre demandé de lui proposer des solutions pour l’élaboration d’objectifs de référence clairs, précis et réalistes qui pourraient l’aider à réexaminer les mesures d’embargo sur les armes à la lumière des progrès réalisés en ce qui concerne les capacités de la Somalie en matière de gestion des armes et des munitions et de l’application de la résolution 2607 (2021), et plus particulièrement à envisager la possibilité de modifier, de suspendre ou de lever ces mesures.

Conformément à la demande du Conseil, une équipe d’évaluation a effectué une mission en Somalie (Mogadiscio et Baidoa, État du Sud -Ouest) du 16 au 24 juillet 2022. L’équipe a également tenu des consultations à Nairobi le 25 juillet 2022. Dirigée par le Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix, l’équipe comprenait également des experts techniques de l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR) et du Service de la lutte antimines de l’ONU. À l’invitation du Gouvernement fédéral somalien, le Groupe d’experts sur la Somalie a également participé à une partie de l’évaluation.

À Mogadiscio, l’équipe a tenu des consultations avec des représentants du Gouvernement fédéral somalien, à savoir : le Conseiller pour les questions de sécurité nationale auprès du Président de la République fédérale de Somalie et son personnel, notamment le coordonnateur national pour la gestion des armes et des munitions, et des représentants des Ministères de la défense, de la sécurité intérieure et de la justice et des affaires judiciaires, ainsi que de l’Armée nationale somalienne et de la Police somalienne, de l’Agence nationale de renseignement et de sécurité, du bureau du maire de Mogadiscio et de la composante nationale de l’Équipe conjointe de vérification.

L’équipe a rencontré le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Somalie et des représentants de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM) et d’ONU-Femmes, ainsi que de la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS), de la Force navale de l’Union européenne au large de la Somalie (opération Atalanta) et de la Mission de formation de l’Union européenne en Somalie. L’équipe a également tenu des consultations avec le HALO Trust et le Mines Advisory Group. À Baidoa, l’équipe a rencontré le chef de la MANUSOM à Baidoa et le commandant du secteur 3 de l’ATMIS. L’équipe a également rencontré les Ministres de la sécurité intérieure et de la justice de l ’État du Sud-Ouest, ainsi que des représentants du Bureau régional des services de sécurité (y compris le responsable de la gestion des armes et des munitions), de l’Armée nationale somalienne et de la Police somalienne. J’ai appris avec tristesse la mort tragique du Ministre de la justice de l’État du Sud-Ouest, Cheik Hassan Ibrahim, et de plusieurs autres personnes, à la suite d’une attaque meurtrière des Chabab peu après cette réunion. L’incident a mis en évidence la menace permanente que le groupe représente pour la paix et la stabilité en Somalie.

Le Gouvernement fédéral somalien a permis à l’équipe d’évaluation de visiter le quartier général de la Police somalienne, un site de stockage d ’armes de la Police somalienne et un entrepôt d’explosifs de la Police somalienne, ainsi que le dépôt d’armes central de Halane et une nouvelle installation de stockage de munitions actuellement en construction à Jazeera, à Mogadiscio. À Baidoa, l’équipe a visité les dépôts de l’Armée nationale somalienne et de la Police somalienne.

À Nairobi, l’équipe a mené des consultations avec le Groupe d’experts sur la Somalie, le Centre régional sur les armes légères, le Bonn International Centre for Conflict Studies, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et l’organisation Conflict Armament Research.

L’équipe a tenu des consultations en présentiel et virtuelles avec les délégations des États Membres, y compris les membres du Conseil de sécurité, basées à New York, Mogadiscio et Djibouti.

Les bureaux des Représentantes spéciales du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés et pour la violence sexuelle en temps de conflit ont également été consultés.

Les conclusions de l’équipe d’évaluation ont été présentés au Gouvernement fédéral somalien et aux membres du Conseil.

La Somalie connaît actuellement une évolution critique alors qu’elle met en œuvre le Plan de transition de la Somalie et assume progressivement une plus grande responsabilité en matière de sécurité nationale. Par la résolution 2628 (2022), le Conseil a demandé des objectifs de référence sur la mise en œuvre de la transition en matière de sécurité, notamment des objectifs de référence servant à mesurer l’efficacité de l’ATMIS et la mise en œuvre du Plan de transition de la Somalie et du dispositif national de sécurité. Par la résolution 2632 (2022), le Conseil m’a également demandé de formuler des recommandations sur les objectifs de référence permettant de suivre l’exécution et la réalisation du mandat de la MANUSOM dans les délais impartis.

Il s’agit de ma troisième évaluation de la gestion des armes et des munitions et de l’embargo sur les armes en relation avec la Somalie (pour les deux évaluations précédentes, voir S/2014/243 et S/2019/616).

Embargo sur les armes et contexte

Un embargo général et complet sur les armes a été établi à l’égard de la Somalie par la résolution 733 (1992) du Conseil de sécurité. Un embargo ciblé sur les armes, applicable aux personnes figurant sur la liste des sanctions du comité compétent, ainsi que d’autres mesures ciblées (interdiction de voyager et gel des avoirs), ont été prévus dans la résolution 1844 (2008). L’embargo territorial sur les armes a été partiellement levé par la résolution 2093 (2013) pour une période limitée, afin de favoriser le développement des forces de sécurité du Gouvernement fédéral somalien et d ’assurer la sécurité du peuple somalien. Depuis lors, le Conseil a encore assoupli et rationalisé l’embargo – par exemple, en ajoutant de nouvelles exemptions, notamment pour les institutions somaliennes du secteur de la sécurité autres que celles du Gouvernement fédéral somalien ; en supprimant l’obligation de notification pour la fourniture de conseils techniques, d’une assistance financière et autre et d’une formation liée aux activités militaires, destinés uniquement au développement des Forces nationales de sécurité somaliennes ; et en renouvelant la levée partielle de l’embargo sur les armes sans date d’expiration, qui était auparavant renouvelée chaque année. Des restrictions à l’importation de composants d’engins explosifs improvisés ont été introduites dans la résolution 2498 (2019).


À l’heure actuelle, l’embargo sur les armes partiellement levé comprend cinq exemptions et l’obligation pour le Gouvernement fédéral somalien de présenter des rapports semestriels, comme indiqué pour la dernière fois dans la résolution 2607 (2021). Les exemptions sont les suivantes : celles soumises à l’approbation du Comité du Conseil de sécurité faisant suite à la résolution 751 (1992) sur la Somalie ; celles nécessitant l’absence d’une décision négative du Comité et une notification après livraison ; celles nécessitant une notification préalable et une notification après livraison adressées au Comité, ou seulement une notification préalable ; et exemptions permanentes (ou dérogations) pour lesquelles aucune décision préalable du Comité ou notification à celui-ci n’est requise. L’obligation d’information porte, entre autres, sur la structure, la composition, les effectifs et la disposition des forces de sécurité du Gouvernement fédéral somalien, ainsi que sur le statut des forces régionales et des milices ; les rapports de l’Équipe conjointe de vérification; et les notifications après distribution. Depuis le début de 2019, date de ma précédente évaluation sur l’embargo sur les armes partiellement levé, le Comité a autorisé huit demandes d’exemption et reçu 100 notifications d’exemption du Gouvernement fédéral somalien, d’autres États et d’organisations régionales. Le Comité a reçu 23 notifications après livraison pendant la même période. Dans le but de fournir des orientations supplémentaires au Gouvernement fédéral somalien, ainsi qu’aux États fournisseurs ou aux organisations internationales, régionales et sous -régionales, concernant les exigences procédurales pour la soumission des demandes d ’exemption et des notifications, le Comité a publié une notice d’aide à l’application actualisée en mai 2022.

Pour une meilleure application de l’embargo sur les armes partiellement levé, une autorisation, renouvelée chaque année, permettant aux États Membres d’intercepter les armes, ainsi que le charbon de bois et des composants d ’engins explosifs improvisés, transportés en violation du régime de sanctions, dans les eaux territoriales somaliennes et en haute mer au large des côtes somaliennes, a été accordée pour la première fois dans la résolution 2182 (2014).

Dans ses échanges avec l’équipe d’évaluation, le Gouvernement fédéral somalien a estimé que l’embargo sur les armes, partiellement levé, entravait la lutte contre les Chabab en limitant l’accès du Gouvernement aux armes, les fournisseurs potentiels ne souhaitant pas s’engager dans le coûteux processus d’approbation ou de notification. Un sentiment d’insatisfaction a été exprimé quant au fait que le Gouvernement continue de manquer de visibilité et de contrôle sur le matériel livré aux institutions somaliennes du secteur de la sécurité autres que celles du Gouvernement, bien qu’il ait été demandé, dans la résolution 2607 (2021), que les États ou les organisations internationales, régionales et sous-régionales informent le Gouvernement fédéral de ces livraisons. En outre, le Comité n’est pas tenu, après avoir reçu des demandes d’exemption ou des notifications pour ces livraisons, de transmettre les informations au Gouvernement.

Le Gouvernement fédéral somalien a réaffirmé sa position antérieure sur la levée complète de l’embargo sur les armes. Cela étant, conscient de l’approche progressive adoptée par le Conseil de sécurité pour assouplir l’embargo sur les armes au cours des années précédentes, il a exprimé son soutien à l’évaluation comparative. Dans un document de position sur l’embargo sur les armes communiqué ultérieurement à l’équipe d’évaluation, le Gouvernement a demandé que certains articles, actuellement sujets à approbation, ne soient plus soumis qu’à notification. Ce document de position conclut que les Forces armées nationales somaliennes qui mènent des offensives dans les zones d’opérations décrites dans le Plan de transition de la Somalie devraient être exemptées de l’embargo partiel sur les armes.

Évaluation de la capacité de gestion des armes et des munitions, y compris des recommandations aux fins d’amélioration, et options pour des objectifs de référence pertinents

On trouvera dans la présente section une évaluation de la capacité de gestion des armes et des munitions de la Somalie, y compris des recommandations aux fins d’amélioration, organisées par étapes du cycle de vie des armes et des munitions et, le cas échéant, soulignant les besoins du pays en matière d’appui. Comme il a été demandé, je présente également des options à l’attention du Conseil de sécurité pour l’élaboration des objectifs de référence pertinents.

Cadre national

Méthode d’évaluation

Depuis mon évaluation de 2019, le Gouvernement fédéral somalien a encore renforcé son cadre national régissant la gestion des armes et des munitions. Le décret présidentiel du 18 septembre 2018 continuant à servir de principale politique nationale, en 2020 le Gouvernement a élaboré une stratégie nationale de gestion des armes et des munitions, avec l’appui de partenaires internationaux. La stratégie offre une feuille de route essentielle pour la gestion des armes et des munitions en Somalie pour la période 2021-2025. Elle énonce les engagements et les objectifs pour la gestion de chaque étape du cycle de vie des armes et des munitions, ainsi que les attributions des différents acteurs, tant au niveau du Gouvernement fédéral que des États membres de la fédération. Elle aborde notamment d’importantes questions transversales, dont le genre. L’équipe d’évaluation considère que la stratégie est un document évolutif, appelé à être mis à jour par le Gouvernement fédéral somalien, le cas échéant. Dans sa résolution 2607 (2021), le Conseil de sécurité s’est félicité de l’adoption de la stratégie.

Par ailleurs, 11 instructions permanentes ont été mises en place pour faciliter la mise en œuvre de la stratégie, celles-ci devant toutefois être adaptées au contexte des États membres de la fédération. Une instruction permanente pour la gestion des armes et des munitions dans l’Armée nationale somalienne, appliquée depuis la précédente évaluation, fournit notamment des orientations sur la livraison des armes aux unités subordonnées, lacune qui avait été relevée dans la précédente évaluation.

Le renforcement du cadre juridique et réglementaire n’a guère connu de progrès notables, probablement du fait du processus électoral et de la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19), entre autres facteurs. Par exemple, les deux projets de loi mentionnés dans l’évaluation précédente, qui visent à réglementer la possession d’armes légères par des civils et les armes détenues par les sociétés de sécurité privées, n’ont pas encore été adoptés.

Recommandations

Preuve d’une volonté politique, d’un engagement et d’une appropriation continus, la stratégie nationale de gestion des armes et des munitions a été élaborée dans le cadre d’un processus consultatif auquel ont participé, pour la première fois, les parties prenantes de la gestion à grande échelle des armes et des munitions au niveau des États membres de la fédération. Le document aborde notamment les besoins et les plans de gestion des armes et des munitions au niveau des États membres de la fédération. Il faudrait poursuivre l’examen des besoins en matière de planification et de mise en œuvre au niveau des États membres de la fédération. La mise en œuvre sera la clé du succès de la stratégie. À cet égard, l ’élaboration d’un plan d’action axé sur les résultats, assorti de points de référence et de cibles claires pour la mise en œuvre de la stratégie, comme indiqué dans le document, devrait être prioritaire. Ce plan, complété par un cadre de formation (voir la section ci -dessous sur la professionnalisation, la formation et le développement des capacités), pourrait également contribuer à cibler le soutien international demandé par la stratégie. J’invite instamment les partenaires internationaux à fournir ce soutien grâce à une coordination étroite et des discussions avec le Gouvernement fédéral somalien, notamment sur les besoins prioritaires de la Somalie.

Le Gouvernement fédéral somalien s’est pleinement engagé à revoir et à adopter des lois, lorsqu’il existe des lacunes, pour assurer l’état de droit et édifier des institutions fortes et crédibles. Partant du décret présidentiel du 18 septembre 2018 relatif au contrôle des armes et des munitions de l’Armée nationale, il faut adopter une législation supplémentaire pour combler les lacunes restantes dans le contexte de la gestion des armes et des munitions. Par exemple, les lois ou décrets relatifs aux transferts internationaux, y compris l’élaboration des critères de passation des marchés et les contrôles d’importation, notamment une liste de contrôle, méritent une attention particulière. Lorsque cette législation peut impliquer des aspects liés aux armes et aux munitions, par exemple dans le contexte des organismes de sécurité d’importance cruciale, le Bureau de la sécurité nationale et d ’autres parties prenantes de la gestion des armes et des munitions doivent avoir une visibilité sur le processus afin de garantir que les composantes de la gestion des armes et des munitions sont prises en compte et convenablement intégrées. Une assistance et un soutien internationaux, y compris la fourniture d’une expertise technique et juridique, seront nécessaires à cet effet.

J’encourage également le Gouvernement fédéral somalien à devenir un État partie aux instruments internationaux et régionaux pertinents relatifs à la maîtrise des armements, et à harmoniser sa législation nationale avec les dispositions de ces instruments.

Compte tenu de ce qui précède, les solutions pour les éventuels objectifs de référence et les indicateurs connexes pourraient être les suivantes.

Objectif de référence 1 : le cadre juridique et réglementaire régissant les armes classiques, y compris les armes légères et de petit calibre, ainsi que les munitions, les composants et le matériel connexe, est suffisamment renforcé

Indicateurs

  • La législation, la réglementation ou les procédures administratives sont en place et mises en œuvre ou opérationnalisées, pour couvrir le cycle de vie des armes et des munitions, y compris les transferts, le marquage, la tenue de registres, le stockage, le traçage, l’utilisation finale et l’élimination finale.
  • Le cadre juridique et règlementaire devrait inclure l’élaboration des critères de passation des marchés, précisant les fonctionnaires compétents autorisés à signer la documentation relative à l’utilisation finale/l’utilisateur final.
  • La mise au point d’un système national de contrôle des transferts pour les importations, y compris l’adoption d’une liste de contrôle qui catégorise et définit clairement les articles soumis au contrôle national des transferts.

Objectif de référence 2 : la stratégie nationale de gestion des armes et des munitions continue d’être mise en œuvre et actualisée

Indicateur

  • Finalisation et opérationnalisation du plan d’action axé sur les résultats, assorti de points de référence et de cibles, pour la mise en œuvre de la stratégie nationale de gestion des armes et des munitions. Il s’agirait de critères de références et de cibles tant au niveau du Gouvernement fédéral que des États membres de la fédération.

Coordination

Méthode d’évaluation

Le Bureau de la sécurité nationale, sous la direction du Conseiller pour les questions de sécurité nationale auprès du Président de la République fédérale de Somalie, continue d’assurer la coordination politique générale et l’orientation des politiques en matière de gestion des armes et des munitions, en plus d’être le bureau de coordination pour toutes les questions liées à l’embargo sur les armes partiellement levé. Au sein du Bureau, un coordonnateur national de la gestion des armes et des munitions officiellement désigné est responsable de la coordination et de la planification appropriées dans l’ensemble des ministères concernés et des forces du secteur de la sécurité, ainsi que de la coordination avec les partenaires internationaux. Le personnel du Bureau comprend également un conseiller pour les sanctions et les questions juridiques. Pour les livraisons d’armes et de matériel militaire soumises à l’approbation ou à la notification du Comité, le Bureau se coordonne avec le Ministère de la défense, qui conduit la planification des achats, et soumet ensuite la documentation pertinente au Comité.

L’évaluation précédente indiquait que le Bureau de la sécurité nationale avait établi une feuille de route visant à mettre en place un mécanisme national officiel de coordination pour les armes légères et de petit calibre, la Commission nationale des armes légères et de petit calibre, également mentionnée dans la résolution 2607 (2021) du Conseil de sécurité. Le Bureau de la sécurité nationale a réaffirmé à ses partenaires de sécurité son engagement en faveur de la création de la Commission, dans le cadre des efforts du Gouvernement fédéral somalien pour mettre en œuvre le Protocole de Nairobi pour la prévention, le contrôle et la réduction des armes légères et de petit calibre dans la région des Grands Lacs et la Corne de l’Afrique. La création de la Commission est également conforme aux engagements pris par les États Membres au titre du Programme d’action pour prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères et de petit calibre sous tous ses aspects.

Depuis 2019, le Gouvernement fédéral somalien a continué d’offrir et d’organiser des plateformes de consultation et de coordination pour les armes et les munitions, bien que moins fréquemment au cours des deux dernières années. Les 19 et 20 mars 2022, le Bureau de la sécurité nationale, avec l’appui de partenaires internationaux, a organisé une conférence de coordination de la gestion d es armes et des munitions, à laquelle ont participé de nombreuses parties prenantes, notamment des États membres de la fédération. La conférence a défini 15 priorités (2022 -2023) et une ventilation des besoins en matière de gestion des armes et des munitions au niveau du Gouvernement fédéral somalien, de l’administration régionale de Benadir (comprenant Mogadiscio) et des États membres de la fédération. Le Bureau de la sécurité nationale prévoit d’organiser une réunion de suivi en septembre de cette année.

Les bureaux régionaux de sécurité, créés en 2017, comptent chacun un coordonnateur de la gestion des armes et des munitions financé grâce au soutien des donateurs. Par l’intermédiaire des bureaux régionaux de sécurité, le Gouvernement fédéral a collaboré avec les États membres de la fédération pour coordonner la mise en œuvre de certaines mesures de gestion des armes et des munitions au niveau des États membres de la fédération. Il s’agit d’une autre avancée importante, étant donné que le renforcement et l’extension du système de gestion des armes et des munitions au-delà de Mogadiscio restent une priorité. La mise en œuvre a jusqu’à présent consisté en des mesures telles que l’étude des capacités et des besoins de stockage, la rénovation et la construction d’un nombre limité de sites de stockage, le marquage et l’enregistrement des armes, ainsi que la surveillance et la vérification.

Recommandations

Le Bureau de la sécurité nationale joue un rôle essentiel dans la coordination de la stratégie et des processus de gestion des armes et des munitions. La mise en place d’un mécanisme national officiel de coordination, sous l’égide de ce Bureau et avec des ressources suffisantes, permettrait de solidifier un processus par lequel toutes les entités publiques concernées travaillent ensemble avec des partenaires internationaux pour concevoir, mettre en œuvre, suivre et évaluer une gestion sûre, efficace et efficiente des armes et des munitions. Elle permettrait également de remédier aux problèmes de capacités et de coordination qui ont été portés à l ’attention de l’équipe d’évaluation lors de sa visite, ainsi qu’aux risques éventuels pour la poursuite de progrès constants en matière de gestion des armes et des munitions. La conception et la mise en place de ce mécanisme relèvent de la décision du Gouvernement fédéral, tout comme la définition de son mandat, les articles visés, les processus décisionnels et la dotation en ressources.

La conférence de coordination tenue en mars 2022 a offert une importante plateforme de discussion entre les parties prenantes du Gouvernement fédéral et des États membres de la fédération, ainsi que les partenaires internationaux. Une réunion de suivi est déjà prévue. De telles rencontres pourraient être organisées régulièrement et systématiquement, afin d’examiner les progrès accomplis, les problèmes rencontrés et les besoins actuels en relation avec la stratégie nationale de gestion des armes et des munitions et le plan d’action pour sa mise en œuvre. La coordination accrue entre le Gouvernement fédéral et les États membres de la fédération que j’ai relevée ci-dessus a été grandement facilitée par les coordonnateurs de la gestion des armes et des munitions situés dans les bureaux de sécurité régionaux. J’engage la communauté internationale à continuer de soutenir ces postes essentiels.

Compte tenu de ce qui précède, les solutions pour les éventuels objectifs de référence et les indicateurs connexes pourraient être les suivantes.

Objectif de référence 3 : un mécanisme national de coordination de la gestion des armes et des munitions et ses principales composantes sont clairement définis et fonctionnent

Indicateurs

  • La dotation en ressources et en capacités suffisantes de l’autorité nationale chargée de la gestion des armes et des munitions et du point focal national pour la gestion des armes et des munitions afin de coordonner la gestion des armes et des munitions.
  • La fréquence et la régularité des réunions de coordination et de consultation sur la gestion des armes et des munitions, y compris le type et le niveau de participation du Gouvernement fédéral et des États membres de la fédération, ainsi que le type et le niveau de participation des parties prenantes internationales.
  • La dotation en ressources et en capacités suffisantes des entités jouant un rôle de coordination au niveau des États membres de la fédération, en particulier les bureaux de sécurité régionaux et les points focaux pour la gestion des armes et des munitions en leur sein.

Marquage et tenue des registres

Méthode d’évaluation

Depuis 2014, le dépôt central de Halane à Mogadiscio est le principal point de réception des armes importées et le principal point de traitement pour le marquage, l’enregistrement, le stockage initial et la distribution des armes importées. Le marquage des armes et la tenue des registres ont connu des améliorations constantes au fil des ans, les armes nouvellement importées étant systématiquement marquées. En outre, le Ministère de la sécurité intérieure a déployé une capacité de marquage mobile à Mogadiscio et au niveau des secteurs. Un soutien international reste nécessaire pour le marquage mobile. L’équipe d’évaluation a examiné les registres du dépôt central de Halane afin de confirmer que les armes nouvellement importées marquées étaient enregistrées et que chaque arme était attribuée aux membres du personnel des forces de sécurité et enregistrée dans leurs dossiers.

En outre, le Gouvernement fédéral somalien en est aux premières é tapes de la mise en œuvre d’un outil de vérification à distance, qui contribue également à la tenue des registres, par la « numérisation » des armes marquées au moyen d’un logiciel de collecte de données sur téléphone portable. Depuis novembre 2020, 6 615 armes de la Police somalienne ont été enregistrées à Mogadiscio et dans deux sites d ’États membres de la fédération. Le Gouvernement fédéral somalien, avec le soutien des donateurs internationaux, prévoit de mettre en œuvre la numérisation du système d’enregistrement des armes dans l’ensemble des Forces armées nationales somaliennes afin d’améliorer les processus de vérification et la responsabilisation. Le Bureau de la sécurité nationale a également l’intention de créer une base de données nationale sur la gestion des armes et des munitions, conformément à la stratégie nationale de gestion des armes et des munitions. Au cours de la visite, l ’équipe d’évaluation s’est vu présenter des parties du prototype de la base de données sur les armes et les munitions.

Le Bureau de la sécurité nationale a en outre confirmé à l’équipe d’évaluation que la deuxième phase de l’enregistrement biométrique, qui consiste à relier chaque arme par son numéro de série au dossier de chaque soldat, était terminée. Le Gouvernement prévoit de relier la base de données sur les armes et les munitions, lorsqu’elle sera établie, à l’enregistrement biométrique.

Grâce aux entretiens avec les parties prenantes, l’équipe d’évaluation a compris que les armes saisies sont rarement marquées et enregistrées (voir également la section sur le traitement et le traçage des armes récupérées ci -dessous). Dans le rapport qu’il a présenté au Conseil de sécurité en août 2022, le Gouvernement a indiqué que 21 armes saisies ont été marquées et enregistré es au moyen du logiciel de traitement à distance au cours de la période considérée.

La comptabilisation des munitions et la gestion de leur cycle de vie n ’en sont qu’à leurs débuts. Le seul processus de comptabilisation existant observé par l ’équipe d’évaluation consistait à enregistrer la réception des munitions au dépôt central et la distribution initiale aux sites des secteurs.

Recommandations

Les progrès réalisés en matière de marquage des armes et de tenue des registres sont à saluer et doivent être poursuivis. À cet égard, j’invite instamment les partenaires internationaux à continuer de fournir le soutien nécessaire, notamment pour appuyer les initiatives de vérification à distance. La base de données nationale sur la gestion des armes et des munitions devrait être déployée en priorité, afin de servir de plateforme de comptabilisation centrale.

Pour que la gestion du cycle de vie des munitions soit efficace, des détails sur les dépenses opérationnelles, les pertes ou les vols, l’âge des munitions, les données sur les ratés et les informations sur l’élimination sont nécessaires. À l’heure actuelle, ces données ne sont pas enregistrées. La mise en place d’un système de comptabilisation des munitions serait importante pour accroître la capacité des autorités nationales à évaluer la qualité et la quantité de leur stock, à faire la distinction entre les stocks excédentaires et les munitions nécessaires à des fins opérationnelles, et à recenser les pertes ou les vols dans le stock de munitions.

Compte tenu de ce qui précède, les solutions pour les éventuels objectifs de référence et les indicateurs connexes pourraient être les suivantes.

Objectif de référence 4 : les systèmes de comptabilisation et de gestion des armes et des munitions sont opérationnels et efficaces

Indicateurs

  • Les armes nouvellement importées, existantes et saisies sont marquées conformément aux normes nationales.
  • Les armes sont enregistrées dans une base de données centrale et la numérisation des armes des Forces armées nationales somaliennes est adaptée aux procédures de vérification.
  • Les procédures de comptabilisation des munitions et de gestion de leur cycle de vie sont mises en place conformément aux directives internationales.

Gestion des stocks d’armes

Méthode d’évaluation

Les entretiens avec les parties prenantes ont confirmé la construction ou la remise en état de dépôts d’armes dans toute la Somalie, principalement financée par des projets d’infrastructure de donateurs. Au moins 242 dépôts de différentes tailles ont été construits au cours des dix dernières années. Cependant, la mesure dans laquelle les dépôts sont utilisés pour sécuriser, stocker et gérer les armes est incertaine. Les parties prenantes et les responsables publics concernés ont confirmé que de nombreux dépôts n’étaient pas utilisés aux fins prévues. L’équipe d’évaluation a inspecté cinq dépôts au cours de la période d’évaluation. Tous étaient suffisants du point de vue de la sécurité physique ; quatre étaient utilisés pour la gestion des armes, mais trois parmi les cinq servaient également à stocker des munitions, y compris des munitions explosives.

Les exigences pour l’infrastructure et les procédures en matière de sûreté, de sécurité et de gestion des armes sont très différentes de celles des munitions. Le dépôt central de Halane reste un problème majeur. Aucune arme n’était stockée sur le site lors de la visite d’évaluation. L’équipe d’évaluation a été informée que les armes étaient en usage. Cependant, contrairement à l’objectif prévu pour un dépôt d’armes, une grande quantité de munitions explosives est stockée à cet endroit depuis 2018. Cela continue de présenter un risque important pour l’aéroport et la population environnante. En août 2021, les entités des Nations Unies ont accepté de financer la construction d’un site de stockage de munitions à Jazeera, en dehors des zones habitées, afin de réduire les risques pour les entités des Nations Unies, la population civile et les infrastructures de l’aéroport international. En janvier 2022, les autorités somaliennes ont autorisé le projet et accepté de transférer les munitions vers le nouveau site une fois les travaux de construction terminés.

Recommandations

Une confusion persiste quant à la sécurité physique et à la gestion des stocks d’armes et de munitions. Un principe fondamental de sécurité physique pour les dépôts est que « les armes devraient être stockées séparément des munitions ». Les autorités somaliennes devraient entreprendre un audit pour déterminer l ’emplacement et l’utilisation actuelle des dépôts d’armes dans toute la Somalie.

L’équipe d’évaluation a également observé au dépôt central de Halane des caisses de munitions qui avaient pourri en raison de conditions de stockage inadéquates dues à une exposition aux inondations et à une chaleur excessive , ce qui constitue un problème de sécurité important, qui doit être traité de toute urgence . Une meilleure gestion du cycle de vie permettra d’améliorer les performances et la fiabilité des munitions pendant les opérations.

Lorsque le projet Jazeera sera terminé, il s’agira du seul dépôt de munitions connu en Somalie. Une gestion sûre et sécurisée des munitions n’est possible que si des systèmes de stockage appropriés, y compris l’infrastructure, est en place. Au minimum, en plus de l’entrepôt central de munitions du Gouvernement fédéral somalien en construction, chaque État membre de la fédération devrait disposer d’un site de stockage de munitions adapté à la réception, au stockage et à la distribution de munitions aux forces de sécurité.

Compte tenu de ce qui précède, les solutions pour les éventuels objectifs de référence et les indicateurs connexes pourraient être les suivantes.

Objectif de référence 5 : les moyens d’assurer la sécurité physique et la gestion des stocks d’armes et de munitions sont disponibles, opérationnels et efficaces

Indicateurs

  • Un audit des dépôts d’armes existants est mené à l’appui d’une évaluation des besoins.
  • Une évaluation des besoins en dépôts d’armes et sites de stockage de munitions et des besoins connexes de formation aux armes et aux munitions est réalisée pour aider les autorités en matière de planification et de dotation en ressources.
  • Des dépôts d’armes suffisants sont disponibles pour les forces de sécurité et sont gérés conformément aux directives internationales pertinentes.
  • Des sites de stockage de munitions suffisants sont disponibles pour les forces de sécurité et sont gérés conformément aux directives internationales pertinentes.

Suivi et vérification

Méthode d’évaluation

Le Groupe d’experts sur la Somalie est le mécanisme de suivi créé par le Conseil de sécurité sur le respect du régime de sanctions, y compris l’embargo sur les armes partiellement levé. Les enquêtes du Groupe sur les violations de l ’embargo sur les armes reposent sur la coopération des États Membres, en particulier la Somalie et les pays voisins. Ces dernières années, la coopération entre le Gouvernement fédéral somalien et le Groupe s’est améliorée.

L’Équipe conjointe de vérification, créée en 2015 et composée de représentants du Gouvernement fédéral et d’experts de l’organisation Conflict Armament Research, effectue des inspections régulières des stocks, des registres d’inventaire et de la chaîne d’approvisionnement en armes des forces du secteur de la sécurité dans le but d’atténuer le détournement d’armes et de munitions. À ce jour, elle a recensé 7 819 armes, soit directement par les soins d’un membre de l’équipe, soit grâce à un membre formé des forces du secteur de la sécurité (actuellement la Police somalienne) à l ’aide d’un logiciel à distance. Elle a en outre vérifié 2 635 armes, provenant de 86 lieux dans la région de Benadir, à Kismayo, dans l’État du Sud-Ouest et à Galmudug, soit environ 12 % des armes déclarées livrées depuis la levée partielle de l’embargo sur les armes en 2013. Alors que les inspections en personne n’ont plus lieu depuis octobre 2019, l’introduction du logiciel de vérification à distance en novembre 2020 a entraîné une augmentation substantielle – de 1 800 % – du nombre moyen d’armes vérifiées par mois.

Recommandations

Le travail du Groupe d’experts et de l’Équipe conjointe de vérification permettra de déceler facilement les voies de détournement potentielles et renforcera la capacité du Gouvernement fédéral de lutter contre les transferts illicites. En tant que tel, l’amélioration de la coopération et du dialogue entre le Gouvernement fédéral et le Groupe est une étape positive, et je salue le travail de l ’Équipe équipe conjointe de vérification. L’élargissement du champ d’intervention de l’Équipe conjointe de vérification permettrait d’obtenir une vue d’ensemble plus complète de la répartition des armes et des munitions en Somalie. À cet égard, la vérification à distance semble favoriser des gains précieux en termes de coûts et de temps.

Compte tenu de ce qui précède, les solutions pour les éventuels objectifs de référence et les indicateurs connexes pourraient être les suivantes.

Objectif de référence 6 : l’Équipe conjointe de vérification est bien coordonnée, dispose de ressources suffisantes, fonctionne et est opérationnelle

Indicateurs

  • Augmentation de la proportion d’armes et de munitions, importées dans le cadre de l’embargo sur les armes partiellement levé pour les forces du secteur de la sécurité, qui ont été répertoriées par l’Équipe conjointe de vérification, directement ou à distance.
  • Augmentation de la proportion d’armes et de munitions déclarées livrées au Comité, recoupées par l’Équipe conjointe de vérification et incluses dans le rapport ordinaire semestriel du Gouvernement fédéral somalien au Comité.
  • Élargissement et approfondissement de la portée de la vérification conjointe, y compris dans les États membres de la fédération.

Traitement et traçage des armes, munitions et composants récupérés, y compris ceux qui ont été confisqués

Méthode d’évaluation

Conformément à la résolution 2607 (2021) du Conseil de sécurité, le Gouvernement fédéral somalien, les États membres de la fédération et l ’AMISOM (désormais ATMIS) sont tenus de répertorier et d’enregistrer le matériel militaire confisqué dans le cadre d’offensives ou d’activités prescrites par leurs mandats, notamment de consigner le type et le numéro de série de l’arme ou de la munition et photographier tous les articles et les marquages utiles. La résolution donne également mandat au Groupe d’experts sur la Somalie d’inspecter ces armes avant leur redistribution ou leur destruction. Le Gouvernement fédéral somalien a fait des efforts importants pour élaborer un cadre pour la gestion du matériel récupéré, dans un environnement réputé difficile, dynamique et opérationnel. Par exemple, en 2020, le Gouvernement fédéral a révisé et adopté son instruction permanente sur la gestion des armes récupérées, et a entamé sa mise en œuvre et poursuivi la formation des forces et organismes du secteur de la sécurité concernés. En 2021, le Gouvernement fédéral somalien et l’AMISOM ont convenu d’une instruction permanente harmonisée sur la gestion des armes légères et de petit calibre récupérées. Compte tenu de la transition de l’AMISOM à l’ATMIS, ce document est en cours d’actualisation par le Gouvernement en coordination avec l’ATMIS. Il n’est pas encore entré en vigueur.

De 2019 à ce jour, l’ATMIS a remis les armes confisquées au Gouvernement lors de deux cérémonies, en février 2020 et en avril 2022.

Recommandations

L’équipe d’évaluation a constaté qu’au niveau des secteurs, l’instruction permanente harmonisée, dont la mise en œuvre effective reste une priorité, est toujours méconnue. Cette mise en œuvre devrait aller de pair avec la mise en place de coordonnateurs au niveau des secteurs et pourrait désormais s’accompagner du déploiement du logiciel à distance, couplé à des kits de marquage mobile, ce qui constitue un moyen important et d’un bon rapport coût-efficacité pour aborder et surmonter certains des problèmes rencontrés dans ce domaine. À cet égard, un soutien international supplémentaire et une assistance sous forme de renforcement des capacités sont nécessaires.

Alors que la résolution 2607 (2021) du Conseil de sécurité fait référence à toutes les armes et munitions et au matériel connexe « confisquées » dans le cadre d’offensives ou dans l’exercice de leur mandat par le Gouvernement fédéral somalien, les États membres de la fédération et l’AMISOM (désormais ATMIS), le Gouvernement fédéral, le Groupe d’experts et l’Équipe conjointe de vérification opérant sous l’égide du Bureau de la sécurité nationale ont appliqué une interprétation plus large de cette exigence pour inclure la gestion de diverses catégories d’armes « récupérées », notamment les armes « confisquées » sur le champ de bataille, mais aussi, par exemple, les articles « saisis » (sur terre ou dans les eaux territoriales somaliennes) ou « trouvés » (dans des caches d’armes). Une reconnaissance de cette approche et son intégration par le Conseil dans la prochaine résolution, en utilisant les terminologies appropriées ci-dessus, serait utile et enverrait un signal important aux acteurs concernés quant à la détermination du Conseil à traiter e t à fermer les sources externes et internes d’approvisionnement illicite par lesquelles les Chabab et d’autres acteurs non autorisés acquièrent ces articles en premier lieu.

L’échange d’informations sur les armes récupérées entre le Groupe d’experts et les différents acteurs somaliens, régionaux et internationaux participant à la mise en œuvre de l’embargo sur les armes partiellement levé, afin de permettre le traçage de ces armes et d’aider à déterminer si une violation de l’embargo sur les armes a eu lieu, aidera le Conseil à mettre en place toute mesure supplémentaire future visant à réduire le flux illicite d’armes vers la Somalie, ainsi qu’à déterminer les besoins de soutien supplémentaires du pays dans ce domaine.

Compte tenu de ce qui précède, les options pour les éventuels objectifs de référence et les indicateurs connexes pourraient être les suivantes.

Objectif de référence 7 : un système coordonné et adapté au contexte est en place pour assurer la traçabilité des armes récupérées

Indicateurs

  • La désignation officielle d’au moins un coordonnateur national ou d’une entité de coordination (telle qu’une cellule d’analyse désignée et établie) pour toutes les questions relatives au suivi ou au traçage des armes, des munitions et des composants récupérés de sources illicites, conformément aux normes et instruments internationaux applicables.
  • L’entrée en vigueur de l’instruction permanente harmonisée du Gouvernement fédéral somalien et de l’ATMIS pour la gestion des armes, des munitions et des composants récupérés, notamment par la désignation et la mise en place de coordonnateurs appropriés.
  • La proportion d’armes récupérées qui peuvent être et ont été tracées par une autorité nationale compétente ou par une entité mandatée et auto risée (telle que le Groupe d’experts sur la Somalie) en coopération et en coordination avec l’autorité nationale compétente, par le biais de mécanismes nationaux, régionaux ou internationaux existants.

J’ai répertorié sept objectifs de référence ci-dessus, sur la base des différentes étapes du cycle de vie de la gestion des armes et des munitions. Tous ces éléments pourraient être considérés comme relevant de la catégorie élargie des progrès en matière de capacité de gestion des armes et des munitions, y compris la prévention du trafic illicite d’armes. Les étapes ci-dessus de la gestion des armes et des munitions sont inextricablement liées aux éléments ci-dessous relatifs à la poursuite de la professionnalisation, de la formation et du développement des capacités des forces de sécurité somaliennes, et peuvent les englober, mais elles sont présentées séparément aux fins de l’évaluation comparative.

Poursuite de la professionnalisation, de la formation et du développement des capacités des forces de sécurité somaliennes

Méthode d’évaluation

Depuis la précédente évaluation en 2019, les forces de sécurité somaliennes ont augmenté leur capacité de gérer leurs armes et leurs munitions, du personnel supplémentaire ayant été formé au marquage et à l’enregistrement, notamment. Le Gouvernement fédéral somalien a indiqué qu’il prévoyait de poursuivre la formation et le développement des capacités, notamment en dispensant une formation supplémentaire sur le marquage, l’enregistrement et la documentation et en créant une cellule d’analyse des armes et des composants d’engins explosifs improvisés confisqués. Il a également indiqué qu’il dispense aux Forces armées nationales somaliennes et à la Police somalienne une formation préalable au déploiement en matière de droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme, notamment par l’application de « politiques sur les droits de l’homme, le code de conduite, le genre et la discipline » concernant la Police somalienne et la police des États. Je note que l’Organisation des Nations Unies continue de fournir un soutien et de dispenser une formation à cet égard, dans le strict respect de la politique de diligence voulue en matière de droits humains en cas d ’appui de l’ONU à des forces de sécurité non onusiennes.

Recommandations

La poursuite de la professionnalisation, de la formation et du renforcement des capacités des forces de sécurité somaliennes renforcerait la capacité de ces dernières à combattre les Chabab et à assumer l’entière responsabilité de la sécurité du pays d’ici la fin du Plan de transition de la Somalie. À cet égard, je demande instamment aux partenaires internationaux de continuer à apporter leur soutien, notamment dans le cadre du Pacte de sécurité. Afin de faciliter la mise en place de capacités durables et à long terme, l’accent devrait être mis sur les programmes de formation des formateurs. Le respect du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme et la poursuite en justice de ceux qui les violent au sein des forces de sécurité sont essentiels pour la mise en place de forces de sécurité somaliennes crédibles, professionnelles et représentatives, comme le demande le Conseil de sécurité. À cet égard, je note que selon le Plan de transition de la Somalie, il est prévu qu’à moyen terme (fin 2024), les forces de sécurité somaliennes fournissent des services au peuple somalien dans le respect du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme.

Je me félicite des échanges que le Gouvernement fédéral somalien a eus à ce jour avec ma Représentante spéciale pour la question des enfants et des conflits armés et ma Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit55. De nouveaux progrès dans l’élaboration d’un nouveau plan d’action national pour la mise en œuvre de la Charte des femmes somaliennes et de la résolution 1325 (2000) sur les femmes et la paix et la sécurité constitueraient une étape importante pour garantir l’inclusion totale et véritable des femmes somaliennes, y compris dans le secteur de la sécurité, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité sur la question, notamment les résolutions 2106 (2013) et 2242 (2015). J’encourage la poursuite de la concertation avec ONU -Femmes à cet égard.

Compte tenu de ce qui précède, les solutions pour les éventuels objectifs de référence et les indicateurs connexes pourraient être les suivantes.

Objectif de référence 8 : un plan de formation consolidé et chiffré, comprenant des programmes de formation des formateurs, pour permettre la mise en œuvre de la stratégie nationale de gestion des armes et des munitions, est adopté. Cela devrait inclure un cadre de formation pour la mise en œuvre de la section de la stratégie consacrée aux questions de genre (comme la définition de quotas pour les stagiaires féminins).

Indicateur

  • Conformément au plan, formation régulière des forces de sécurité à la gestion des armes et des munitions, y compris au niveau des États membres de la fédération.

Objectif de référence 9 : les acteurs compétents continuent de collaborer avec la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, notamment en vue d’adopter des plans d’action pour lutter contre les violences sexuelles en temps de conflit

Indicateurs

  • Création et mise en œuvre d’un registre national des délinquants sexuels, sur la base duquel les recrues potentielles de l’Armée nationale somalienne et de la Police somalienne seront sélectionnées.
  • Création et mise en œuvre de mécanismes au sein de l’Armée nationale somalienne et de la Police somalienne pour amener les auteurs de violences sexuelles à répondre de leurs actes, comme en témoigne le nombre d ’affaires totalement traitées.

Objectif de référence 10 : les acteurs compétents continuent de collaborer avec la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés, notamment en vue de la mise en œuvre de la feuille de route sur les enfants et les conflits armés (2019)

Indicateurs

  • Mise en place et application effective de procédures claires d ’évaluation et de contrôle de l’âge pour l’Armée nationale somalienne et la Police somalienne.
  • Poursuite de l’application des instructions permanentes relatives au transfert des enfants séparés des groupes armés aux acteurs de la protection de l’enfance, approuvées par le Gouvernement en 2014, afin de leur permettre de joindre les enfants à chaque étape du processus de libération et de réinsertion.
  • Création et mise en œuvre de mécanismes au sein de l’Armée nationale somalienne et de la Police somalienne pour amener les auteurs de violations graves commises contre des enfants à répondre de leurs actes, comme en témoigne le nombre d’affaires totalement traitées.

Les objectifs de référence ci-dessus peuvent être considérés comme relevant de la catégorie générale des progrès réalisés en matière de réforme du secteur de la sécurité.

Observations

Je remercie le Gouvernement fédéral somalien et, par son intermédiaire, les représentants de l’État à Baidoa, pour leur solide coopération et leur participation active à cette évaluation, notamment pour l’accès total accordé à l’équipe d’évaluation. Je me réjouis que le Gouvernement fédéral ait invité le Groupe d’experts à se joindre à l’équipe d’évaluation pour les réunions et les visites sur le terrain à Mogadiscio, ce qui témoigne du renforcement continu de la coopération entre le Gouvernement et le Groupe. Je tiens à exprimer ma gratitude aux entités des Nations Unies présentes en Somalie, à l’ATMIS, aux États Membres et aux organisations régionales et internationales pour leur soutien et leur engagement aux côtés de l’équipe d’évaluation.

La Somalie est sur une trajectoire positive dans sa gestion des armes et des munitions. Des mesures importantes ont été prises à différents stades du cycle de vie de la gestion des armes et des munitions, des progrès notables ayant été accomplis, par exemple, en matière de marquage et d’enregistrement. En outre, le cadre national a été renforcé par l’adoption de la stratégie nationale de gestion des armes et des munitions. Toutefois, il reste des défis à relever, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre de la gestion des armes et des munitions au niveau des États membres de la fédération, ce qui nécessitera la poursuite des échanges et de la coopération nécessaires entre le Gouvernement fédéral et les États membres de la fédération. La présente lettre énonce des options pour des objectifs de référence qui pourraient aider le Conseil de sécurité à examiner l’embargo sur les armes partiellement levé dans les années à venir. Les objectifs de référence, une fois établis par le Conseil, devraient être régulièrement évalués en fonction des progrès accomplis dans leur mise en œuvre. Il importe que la communauté internationale aide le Gouvernement fédéral et les États membres de la fédération, selon qu’il conviendra, à poursuivre ces progrès, notamment en fournissant des ressources et un soutien au renforcement des capacités de manière coordonnée et cohérente. À cet égard, un financement prévisible est important pour faciliter la planification à long terme.

Dans l’immédiat, forts des conclusions de l’équipe d’évaluation, le Conseil de sécurité et son Comité 751 sur la Somalie pourraient faire le point sur l ’embargo sur les armes partiellement levé, notamment en vue d’actualiser et de clarifier les exemptions et les dérogations. Un examen des deux annexes définissant les exemptions, allant de pair avec une révision de la disposition d ’exemption relative à la livraison de matériel militaire non létal, pourrait permettre d’apporter de nouveaux ajustements à l’embargo. La visibilité qu’a le Gouvernement fédéral au sujet des livraisons aux institutions somaliennes du secteur de la sécurité autres que celles du Gouvernement pourrait être encore améliorée.

Une concertation plus étroite et régulière entre le Gouvernement fédéral et le Comité, éventuellement dans le cadre d’une discussion régulière après la présentation de chaque rapport semestriel du Gouvernement fédéral, peut favoriser une meilleure compréhension des préoccupations et des besoins du Gouvernement fédéral et des vues du Comité. Une concertation périodique entre les pays de la région et le Comité, afin de sensibiliser aux tendances et aux schémas du trafic d’armes transfrontalier, peut permettre de trouver d’autres solutions pour lutter contre le trafic illicite d’armes vers la Somalie.

Compte tenu de la stigmatisation persistante ressentie par le Gouvernement fédéral en rapport avec l’actuel embargo sur les armes, j’encourage le Conseil de sécurité et son Comité à renforcer leur message à l’intention du public, afin d’indiquer clairement que la mesure vise à aider la Somalie à développer ses capacités de gestion des armes et des munitions et à renforcer ses forces de sécurité en vue d ’assurer la sécurité du peuple somalien. J’invite le Gouvernement fédéral, ainsi que les États membres de la fédération, à poursuivre leurs efforts en vue de consolider les acquis et à renforcer encore leurs capacités, le cas échéant, afin de s’acquitter des obligations découlant de l’embargo sur les armes partiellement levé.


Secrétariat
Secrétariat

António Guterres

Publications recommandées