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S/2022/838 : Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel

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Rapport du Secrétaire général

I. Introduction

1. Le présent rapport est soumis en application de la résolution 2391 (2017) du Conseil de sécurité, adoptée le 8 décembre 2017, dans laquelle le Conseil a prié le Secrétaire général de lui faire rapport, en étroite coordination avec les États membres du Groupe de cinq pays du Sahel (G5 Sahel) – Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad – et l’Union africaine, sur les activités de la Force conjointe du G5 Sahel et l’appui fourni par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) à cet égard. Le 29 juin 2022, le Conseil a adopté la résolution 2640 (2022), par laquelle il a prorogé le mandat de la MINUSMA et recommandé que la Mission renforce son appui à la Force conjointe, conformément à sa résolution 2531 (2020). Le présent rapport couvre la période allant du 12 mai au 8 novembre 2022.

2. L’instabilité de la situation politique et des conditions de sécurité au Sahel ont continué d’entraver le bon fonctionnement de la Force conjointe. La décision prise en mai par le Mali de se retirer du G5 Sahel, à la suite de désaccords sur l ’accession des autorités de transition maliennes à la présidence du mécanisme, sape considérablement cette importante initiative régionale en matière de sécurité. Parallèlement, parmi les problèmes qui ont contribué à considérablement ralentir la cadence des opérations de la Force conjointe, en particulier dans les secteurs centre et ouest, il convient de citer le redéploiement de l’opération Barkhane et le coup d’état au Burkina Faso.

II. Activités de la Force conjointe

A. Déploiement des contingents

3. Le 15 mai, les autorités maliennes ont annoncé leur retrait du G5 Sahel et de ses institutions, dont la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel . En conséquence, le 25 mai, l’Union européenne a demandé à la MINUSMA de suspendre la fourniture d’articles consommables essentiels aux deux bataillons maliens de la Force conjointe, à savoir les bataillons de Boulikessi et de Goma Koura. Après le retrait effectif du Mali du G5 Sahel, le quartier général de la Force conjointe a été temporairement redéployé à N’Djamena, à la fin du mois de juin.

4. Le retrait du Mali et le déménagement du quartier général ont conduit à l’interruption de la livraison trimestrielle d’articles consommables essentiels à la Force conjointe, qui a repris à la fin du mois d’août, après plusieurs séries de consultations techniques entre la MINUSMA et l’Union européenne.

5. Les 21 et 22 septembre, une réunion du Comité de défense et de sécurité du G5 Sahel s’est tenue à Niamey, après plusieurs ajournements depuis la précédente réunion en octobre 2021. Les chefs d’état-major des armées et les ministres de la défense et de la sécurité des États membres ont confirmé leur volonté de maintenir le G5 Sahel et ses institutions, malgré le retrait du Mali, et se sont mis d’accord sur la reconfiguration imminente de la Force conjointe.

6. La Force conjointe a continué à mener des opérations militaires dans ses secteurs centre, ouest et est. Au total, sept opérations militaires majeures ont été menées. Dans le secteur centre, la Force conjointe a mené l’opération Hamokargui 2, du 11 au 12 mai, l’opération Kana 3, du 6 au 10 juin, et l’opération Hamokargui 3, du 19 au 23 juillet. Ces opérations ont contribué au recueil de renseignements et à l’établissement effectif de la présence de la Force conjointe dans la zone des trois frontières entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger.

7. Dans le prolongement de l’opération Kana 2, qui s’est terminée en mars 2022, l’opération Kana 3 a été menée conjointement par les bataillons burkinabé et nigérien. Au cours de ces opérations, la Force conjointe aurait sécurisé la zone entourant Markoye le long de la frontière entre le Burkina Faso et le Niger. En outre, dans le cadre de l’action civilo-militaire, l’opération Kana 3 a permis d’assurer la fourniture de services médicaux militaires à 469 civils. De plus, pendant la période à l ’examen, les opérations Hamokargui 2 et Hamokargui 3 ont renforcé l’action civilo-militaire dans tout le secteur centre.

8. Dans le secteur ouest, à la frontière entre la Mauritanie et le Mali, deux opérations militaires de reconnaissance ont été menées par le bataillon mauritanien de la Force conjointe, soit l’opération Ravgue 1, du 28 mai au 3 juin, et l’opération Ravgue 2, du 5 au 10 septembre. La Force conjointe a indiqué que ces opérations avaient permis de sécuriser les zones d’Adel Bagrou, Bogla et Nbeïket el-Ahouach le long de la frontière mauritanienne avec le Mali et qu’une aide médicale avait été dispensée à environ 120 personnes.

9. Dans le secteur est, le long de la frontière nigéro-tchadienne, la Force conjointe a mené l’opération Nadhif 1, du 28 mai au 1er juin, et l’opération Nadhif 2, du 5 au 15 septembre. Les deux opérations militaires ont abouti à une dissuasion efficace du trafic d’armes le long de la frontière libyenne : elles auraient en effet découragé les incursions des groupes armés non étatiques et permis de récupérer des munitions, dont plus de 84 armes.

B. Déploiement de la composante police

10. Il n’y a pas d’information nouvelle pour la période du 12 mai au 8 novembre 2022.

C. Secrétariat et cadre institutionnel du Groupe de cinq pays du Sahel

11. Le secrétariat exécutif du G5 Sahel continue de fonctionner malgré le retrait du Mali de l’organisation. Le Groupe continue d’organiser des réunions et des ateliers avec l’appui de partenaires internationaux, dont l’ONU, en vue de la mise en œuvre du Programme d’investissements prioritaires. Le 2 août, il a inauguré l’Académie régionale de police du G5 Sahel à N’Djamena et organisé un atelier pour dynamiser la Plateforme de coordination de la sécurité.

12. Le secrétariat exécutif et les autres composantes du G5 Sahel ont poursuivi leurs activités, telles que la mise en œuvre de la politique de genre du G5 Sahel et la formation des femmes leaders au dialogue, en collaboration avec l’Union africaine et le Réseau ouest-africain d’édification de la paix (WANEP). D’autres activités ont été organisées, conjointement par les entités du G5 Sahel et les donateurs, afin de renforcer la prévention de l’extrémisme violent et de soutenir les autorités locales dans leur gouvernance en matière de sécurité. Plusieurs organismes, fonds et programmes des Nations Unies ont poursuivi l’exécution de leurs programmes d’appui au G5 Sahel, notamment ceux qui concernent le renforcement des capacités régionales dans les domaines de la justice pénale, de la gestion de la sécurité des frontières et de la prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violent.

13. Dans le contexte du retrait du Mali du G5 Sahel, les efforts diplomatiques se sont poursuivis en vue d’encourager le Mali à réintégrer l’organisation. Les autorités mauritaniennes et tchadiennes ont dépêché des délégations au Mali en mai. Le 14 juillet, le Président nigérien, Mohamed Bazoum, et le Président tchadien, Mahamat Idriss Deby Itno, ont publiquement invité le Mali à rejoindre le G5 Sahel lors d’une conférence de presse conjointe à N’Djamena.

14. En outre, Annadif Khatir Mahamat Saleh qui était alors Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, s’est entretenu avec des ministres de Mauritanie, du Tchad et du Mali ainsi qu’avec M. Bazoum sur l’importance de la solidarité entre les États membres du G5 Sahel. Il a reçu des réactions positives de la part de ses interlocuteurs. De même, le secrétaire exécutif du G5 Sahel, Eric Y. Tiaré, a rencontré les Chefs d’État du Burkina Faso, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad pour renforcer la cohésion interne de l’organisation. Grâce à ces efforts diplomatiques, un sommet des chefs d’État est envisagé à Nouakchott avant la fin de l’année 2022.

15. Le 23 juin, le Comité de défense et de sécurité s’est réuni à Niamey, avec la participation du Mali. Tous les participants sont convenus, en principe, d’établir des mécanismes de coordination bilatérale pour assurer la cohésion entre pays voisins. Des efforts pour renforcer la coopération bilatérale sont constatés entre le Mali et la Mauritanie, entre le Burkina Faso et le Mali, entre le Burkina Faso et le Niger, ainsi qu’entre le Tchad et le Niger.

16. Par la suite, le remaniement de la Force conjointe a été examiné lors de la réunion du Comité de défense et de sécurité qui s’est tenue les 21 et 22 septembre. Il a été décidé, à cette occasion, de mettre au point un nouveau concept d’opérations pour la Force conjointe, qui tiendrait compte de l’évolution des conditions de sécurité, de la situation humanitaire et du retrait du Mali, et les participantes et participants ont appelé à un renforcement de la coopération bilatérale, demandant notamment qu’un plus grand nombre d’opérations coordonnées entre pays voisins soient menées. Il a également été décidé à la même réunion de geler les postes de commandement dans tous les secteurs, dans le but d’établir des postes ad hoc en fonction des opérations militaires, tout en reconfigurant le quartier général, qui devrait être une structure plus agile et plus rentable.

III. Application de l’accord technique

17. La MINUSMA a continué à fournir un appui aux six bataillons de la Force conjointe hors du Mali, à savoir Dori au Burkina Faso, Wour et le huitième bataillon au Tchad, Nbeïket el-Ahouach en Mauritanie et Téra II et Madama au Niger. Ceci est conforme à l’accord tripartite entre l’ONU, l’Union européenne et le secrétariat exécutif du G5 Sahel, ainsi qu’aux résolutions 2391 (2017), 2480 (2019), 2531 (2020), 2584 (2021) et 2640 (2022) du Conseil de sécurité. Bien qu’aucune réunion tripartite n’ait eu lieu, les consultations techniques entre la MINUSMA, l’Union européenne et la Force conjointe se sont poursuivies aux fins de la réalisation de l’appui opérationnel et logistique.

Articles consommables essentiels

18. Entre le 17 septembre et le 15 octobre, la MINUSMA a livré un total de 499 486 litres de diesel et 43 414 litres d’huile et de lubrifiant au quartier général et aux bataillons de la Force conjointe pour le deuxième trimestre de 2022, conformément à la demande de soutien qu’elle lui a adressée le 30 avril. Les activités ont été menées dans le respect de la politique de diligence voulue en matière de droit s humains en cas d’appui de l’ONU à des forces de sécurité non onusiennes. La Mission a mobilisé un fournisseur malien et deux fournisseurs internationaux pour assurer la livraison d’articles consommables essentiels au Burkina Faso, en Mauritanie, au Niger et au Tchad.

19. La livraison de 72 640 boîtes de rations individuelles a débuté le 17 septembre et comprenait 16 320 boîtes résiduelles du premier trimestre 2022 destinés aux deux bataillons maliens de Boulikessi et de Goma Koura et au bataillon Téra II avant son redéploiement du Niger au Tchad. Au 26 septembre, toutes les boîtes de rations avaient été réacheminées vers Dori, au Burkina Faso, et Nbeïket el-Ahouach, en Mauritanie.

20. Pour améliorer l’efficacité opérationnelle pendant les troisième et quatrième trimestres de 2022, la MINUSMA et l’Union européenne ont décidé de commencer des livraisons segmentées, ce qui a été approuvé le 22 septembre par le Comité de défense et de sécurité. L’exécution a débuté une fois les demandes d’appui reçues de la Force conjointe, le 5 septembre et le 6 octobre respectivement, pour ces deux derniers trimestres.

Soutien génie

21. La MINUSMA n’a pas fourni de soutien génie, car elle n’a pas reçu de requête à cette fin.

Évacuations sanitaires et transport

22. La MINUSMA n’a pas fourni de soutien en matière d’évacuation ou de transport de blessés, car elle n’a pas reçu de requête à cette fin.

IV. Application du cadre réglementaire relatif au respect des droits humains et du droit international humanitaire et de la politique de diligence voulue en matière de droits humains en cas d’appui de l’ONU à des forces de sécurité non onusiennes

23. La MINUSMA et le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) ont continué à soutenir la Force conjointe dans les domaines suivants : respect des droits humains et du droit humanitaire ; renforcement des capacités ; lutte contre l’impunité ; application de la politique de diligence voulue en matière de droits humains. Conformément à la politique de diligence voulue, la MINUSMA a réalisé 16 évaluations des risques en réponse aux demandes de soutien soumises par la Force conjointe pour les bataillons opérant au Burkina Faso, en Mauritanie, au Niger et au Tchad. Des mesures d’atténuation adaptées ont été recommandées pour faire face aux risques ainsi recensés. L’application des mesures d’atténuation n’a enregistré que des progrès limités et certaines recommandations ont perdu leur pertinence en raison du retrait du Mali du G5 Sahel.

24. Le HCDH a continué d’assister la Force conjointe en matière de respect des droits humains et du droit humanitaire et de renforcement des capacités, à l’intention des bataillons et des unités prévôtales. Dans ce contexte, il a organisé deux sessions de formation en Mauritanie et au Niger, une série de 12 activités de sensibilisation pour le poste de commandement du G5 Sahel dans le secteur est et une autre au Niger, pour le bataillon basé à Téra.

25. Du 17 au 20 mai, le HCDH a animé un atelier de formation à Niamey, à l’intention des instructeurs de la police, de la gendarmerie, de la garde nationale, des forces armées nigériennes, des services de protection civile, de l’administration pénitentiaire et des écoles et centres de formation du service central de lutte contre le terrorisme. Ainsi, les participants, dont cinq officiers du G5 Sahel affectés au secteur centre à Niamey, pourront remplir les fonctions de formateurs pour les questions de respect des droits humains et du droit international humanitaire. Du 23 au 26 mai, le HCDH a organisé, à Néma (Mauritanie), une session de formation sur les droits humains et la judiciarisation des opérations militaires à l’intention de l’unité prévôtale de la Force conjointe.

26. Ces activités du HCDH ont contribué à ses efforts visant à soutenir l’entrée en fonction de la composante police du G5 Sahel. Dans cette optique, le Haut-Commissariat recense actuellement les moyens de renforcer la collaboration avec de nouveaux partenaires sur le terrain, tels que le Programme d’appui aux composantes légale et prévôtale de la Force conjointe du G5 Sahel pour un meilleur fonctionnement de la justice militaire dans les pays du G5 Sahel.

27. En outre, entre mai et août, le HCDH a organisé, à l’intention des officiers et sous-officiers du poste de commandement de la Force conjointe à N’Djamena dans le secteur est, une série de 12 sessions visant à sensibiliser les participantes et participants aux principes des droits humains et du droit international humanitaire, ainsi qu’aux aspects spécifiques du cadre réglementaire de la Force conjointe et de son contexte opérationnel, tels que le rôle et les responsabilités de la composante police et sa collaboration avec les militaires. Chaque session a réuni au moins 36 participantes et participants (dont au moins 3 femmes).

28. Le 12 septembre, dans le cadre d’une mission sur le terrain à Téra du 11 au 15 septembre, le HCDH a organisé une séance de sensibilisation aux droits humains et au droit international humanitaire à l’intention de 30 officiers et sous-officiers (dont une femme) du bataillon nigérien de la Force conjointe basé à Téra. Cette activité a renforcé les connaissances des participants sur les violences sexuelles liées aux conflits, les six violations graves relatives aux enfants et aux conflits armés et la responsabilité pertinente des commandants et autres responsables hiérarchiques.

29. Le 13 septembre, le HCDH a organisé, à Téra, un atelier visant à redynamiser un dispositif d’alerte rapide, dont il avait appuyé la création en novembre 2021 afin de faciliter la communication et la collaboration entre les populations, les autorités locales et la Force conjointe pour améliorer la protection des civils. Cet atelier, qui a rassemblé 20 participantes et participants (dont 3 femmes), issus des forces de défense et de sécurité, de l’administration publique, de la société civile et des autorités traditionnelles, a permis de faire le point sur les conditions de sécurité dans le département de Téra et de mettre à jour le plan de travail annuel pour 2021/22 associé à ce dispositif.


30. Les 20 et 21 avril 2022, afin d’aider la Force conjointe à mieux intégrer la protection des civils dans ses opérations militaires, le HCDH et le poste de commandement du secteur centre de la Force ont organisé, à Niamey, une session conjointe d’examen après les opérations militaires Kana 1 et Kana 2, menées respectivement en février et mars 2022, dans la zone des trois frontières. La formation a permis aux participantes et participants d’évaluer conjointement le respect des droits humains et du droit international humanitaire lors de ces opérations, ainsi que leurs effets sur la population civile. Elle a également été l’occasion de formuler des recommandations pour améliorer les pratiques dans les opérations futures et pour mieux intégrer les droits humains et les normes humanitaires internationales dans les opérations militaires.

31. À la suite d’enquêtes sur des allégations d’exécutions extrajudiciaires de plusieurs citoyens mauritaniens, ainsi que de passages à tabac et de pillages de biens de civils les 5 et 6 mars 2022 au Mali, près de la frontière avec la Mauritanie, le HCDH a conclu que ces violations n’étaient pas imputables à la Force conjointe, à l’instar du Groupe d’experts sur le Mali, qui, dans son rapport du 3 août 2022 (voir S/2022/595, par. 99), a imputé les meurtres à l’armée malienne et à des « soldats à la peau blanche ». Du 20 au 24 juillet, le HCDH a mené une mission de surveillance et d’enquête dans le village de Seredouba où certains membres de la famille des victimes avaient trouvé refuge. L’équipe du HCDH a été informée qu’une délégation du Gouvernement mauritanien conduite par le Ministère des affaires religieuses s’était rendue sur les lieux pour exprimer le soutien du Gouvernement et apporter une aide financière à un total de 14 familles de victimes. Les conclusions de la commission conjointe établie par les deux pays pour enquêter sur ces allégations n’ont pas encore été rendues publiques.

32. Du 6 au 10 juin, le HCDH a effectué une mission à Dori, au Burkina Faso, pour enquêter sur des allégations d’exécutions sommaires et extrajudiciaires au cours d’opérations militaires survenues entre le 10 et le 11 avril 2022 dans des villages situés dans les communes de Gorom et Markoye. Les équipes du Haut-Commissariat ont interrogé une quinzaine de victimes et de témoins ainsi que d’autres sources locales et ont conclu que la Force conjointe n’était pas directement impliquée dans ces opérations. Une enquête est actuellement menée pour déterminer l ’implication possible de certains soldats de la Force conjointe opérant sous commandement national.

33. Dans la nuit du 25 au 26 mai, trois individus, dont un soldat affecté au bataillon nigérien de la Force conjointe basé à Téra, se seraient introduits par effraction dans le domicile d’un commerçant. Suite aux enquêtes préliminaires menées par la gendarmerie locale, sous la direction du parquet de Téra, l’affaire a été transférée au commissaire du Gouvernement basé à Niamey, qui a placé les suspects, dont l’élément de la Force conjointe, sous mandat de dépôt. En attendant leur procès devant le tribunal militaire, les suspects sont détenus à la prison civile de Niamey.

V. Problèmes et défis

34. Les divergences politiques entre les États membres du G5 Sahel, qui ont culminé avec le retrait du Mali de l’organisation, ont contribué à entraver davantage la fourniture de soutien de la MINUSMA à la Force conjointe.

35. Les problèmes techniques et opérationnels sont restés préoccupants. Il s’agissait notamment d’un manque de capacité de stockage sur certains sites de bataillons ou dans certaines zones d’opérations, d’une maintenance insuffisante du matériel de stockage, en particulier pour les rations de combat, et de la fourniture tardive des lettres d’exonération fiscale par les États membres. Pour remédier à ces problèmes, la MINUSMA s’est appuyée sur ses contractants privés opérant au Burkina Faso, en Mauritanie, au Niger et au Tchad, qui fournissent un soutien aux bataillons de la Force conjointe. Parallèlement, elle a assuré la liaison avec le commandant de la Force conjointe et les autorités nationales du G5 Sahel.

36. En outre, l’insécurité et le manque d’infrastructures le long des voies d’approvisionnement ont continué à poser des problèmes. Par exemple, le pont de Nare au Burkina Faso a été attaqué et endommagé à deux reprises, le 15 juillet et le 22 août, puis réparé le 20 juillet et le 26 août. En consultation avec la Force conjointe, d’autre axes d’approvisionnement ont été empruntés entre Kaya et Dori au Burkina Faso pendant les mois de juillet et d’août.

VI. Faits nouveaux connexes

37. Le Groupe indépendant de haut niveau sur la sécurité et le développement au Sahel, présidé par l’ancien Président du Niger, Mahamadou Issoufou, a été inauguré lors de la réunion de haut niveau sur le Sahel, en marge de la soixante -dix-septième session de l’Assemblée générale, sous les auspices de l’ONU, de la Commission de l’Union africaine, de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et du G5 Sahel. Lors de la réunion, les participantes et participants ont mis en relief les problèmes qui compromettaient la paix et la sécurité au Sahel, notamment la montée de l’extrémisme violent, les économies fragiles soumises à des contraintes causées par les changements climatiques et les répercussions de la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19), ainsi que les transitions politiques complexes. Ils ont exprimé leur soutien aux travaux du Groupe et à l’examen stratégique des interventions internationales plus larges dans la région. Ils ont également fait valoir la nécessité d’améliorer la coordination et le soutien mutuel entre les trois piliers (gouvernance, résilience, sécurité) dans la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel. Le Groupe fera le bilan stratégique de l ’activité internationale dans la région et formulera des recommandations sur la manière d’améliorer son efficacité globale.

VII. Observations

38. La vague de terrorisme qui déferle sur la région du Sahel fait peser une grave menace sur la paix et la sécurité internationales. Je suis gravement préoccupé par l’impact de la crise sur les civils : la multiplication du nombre de personnes déplacées, l’insécurité alimentaire croissante, les violations des droits humains, en particuliers les droits des femmes, le déni d’accès à l’éducation pour des millions d’enfants.

39. Cette situation est une préoccupation stratégique non seulement pour la sous - région mais aussi pour le continent africain et au-delà. Elle exige donc une réponse multidimensionnelle coordonnée entre pays voisins avec le soutien des partenaires régionaux et internationaux. La Force est une composante régionale importante qui vient compléter les activités multiformes des Nations Unies et d’autres partenaires internationaux dans la région.

40. Je salue tous les efforts qui sont déployés pour améliorer l’efficacité de la force conjointe et pour promouvoir les bonnes relations et la coopération entre les États membres du G5 Sahel. L’ONU continuera à soutenir ces efforts, par l’intermédiaire des représentantes et représentants spéciaux dans la région .

41. L’efficacité de la Force conjointe et la viabilité de ses opérations dépendent largement de la façon dont elle respecte ses obligations en matière de droits humains et de droit international humanitaire pendant les opérations militaires. À cet égard, le HCDH poursuivra son action pour l’aider à appliquer son cadre réglementaire.

42. Les solutions les plus pérennes et efficaces à long terme face aux causes de l’insécurité sont la bonne gouvernance, le respect des droits humains et un développement durable inclusif qui ne laisse personne de côté. Pour relever les vastes défis qui se présentent au Sahel, au-delà de la Force conjointe, il faut un cadre adaptatif et agile de coopération sous-tendu par des efforts transversaux dans les domaines social, économique et politique, ainsi que dans les secteurs du développement, de l’aide humanitaire, du relèvement et de l’appui.

43. Dans ce contexte, j’attends avec intérêt les conclusions et les recommandations du Groupe indépendant de haut niveau sur la sécurité et le développement au Sahel, sous la direction de l’ancien Président du Niger, Mahamadou Issoufou.



Secrétariat
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António Guterres

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