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Eau - Déshydratation et Perfusion pour les poules

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Savez-vous comment agir en cas de coup de chaleur ? Comment identifier et mesurer précisément une déshydratation ? Quelles mesures prendre en cas de températures extrêmes ? Sauriez-vous réhydrater une poule vous-même ?  Poser une perfusion ?


On va voir ici comment répondre à toutes ces questions et être capable d’agir efficacement dans ces situations : réviser un peu les bases d’une eau “saine”, les précautions et les solutions pour passer le mieux possible les périodes de chaleur ou de froid extrêmes. 


On verra ensuite comment déceler, tester, mesurer et bien entendu, comment remédier à une situation qui peut rapidement très mal se terminer : la déshydratation.


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Menu

1• L’eau et la poule
2 • Les températures extrêmes 
3 • La déshydratation
4 • Les maladies et la déshydratation
5 • Comment tester la déshydratation
6 • Prise en charge d’urgence
7 • Réhydratation à la seringue
8 • Perfusion intraveineuse 

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1. La qualité de l’eau et la poule


La poule est constituée à 60% d'eau, son sang en contient 80%, un œuf 65%. Quand elle est en bonne santé, une poule “moyenne” ingère environ 200ml d'eau par jour, 3 à 400ml quand il fait chaud et parfois plus en cas de canicule.


Cette eau est principalement trouvée dans sa boisson et son alimentation en végétaux. 


Selon la qualité de l’eau initiale ET la propreté de l’installation, l’eau se conservera entre 6h et 72h : une différence notable qui varie simplement si on nettoie les abreuvoirs à chaque changement d’eau… ou pas. Au delà de 3 jours vous pouvez considérer que l'eau - même dans des conditions très favorables - est devenue pathogène.



Les eaux de pluie, de citernes ou  de gouttières sont toutes - par nature - impropres à la consommation, vecteurs d’intoxications, d’empoisonnement et/ou d'une multitude de maladies virales et bactériennes.


Une eau de pluie macérant au sol au milieu des fientes ne dérange pas forcément une poule. Au contraire, elle préfèrera d’abord boire de l’eau croupie plutôt que celle de l’abreuvoir. A vous de veiller à ce que vos poulettes puissent toujours accéder à une eau pure et saine, à combler les trous au sol, retirer d’éventuels récipients pouvant se remplir d’eau de pluie.


Utilisez de l’eau du robinet. Celle-ci contient 0.02% de chlore et pourra mieux se conserver. Dans la mesure du possible, dès que l’été arrive, ajoutez toujours un ou plusieurs points d’eau supplémentaires (sans additif) au cas où votre abreuvoir se vide, s’évapore, ne se renverse ou soit souillé par des fientes ou de la terre.

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2. Les températures extrêmes 


En hiver, l’eau gelée peut aussi causer des déshydratations. Les mécanismes des distributeurs à pipettes seront parfois bloqués par le gel et les abreuvoirs seront recouverts d’une épaisse couche de glace. Utilisez de préférence des saladiers ou des récipients ouverts en cas de risque de gel. Veillez à vérifier tous les jours (en particulier le matin et le soir) que l’eau n’est pas gelée et remplacez-là au besoin. Notez qu’une eau à température ambiante dans un récipient, gèle moins vite qu’une eau chaude, c’est un principe physique.



Dès que la température dépasse 25°c, les poules commencent à souffrir de la chaleur en raison de leur plumage :  par une température de 25°, leur ressenti sera en fait de 35°. Les poules souffrant du chaud vont bailler du bec, ouvrir les ailes, tenter de trouver de l’ombre, s’enterrer… et même si elles ont soif, elles finiront par ne plus bouger. Vous devez donc prévoir des points d’eau au plus près des poules et vérifier qu’elles s’y abreuvent.


Par forte chaleur, vous pouvez aider les poules à se rafraîchir en ajoutant une pincée de bicarbonate alimentaire dans l’eau (2.5g par litre d’eau). Le bicarbonate régule le ph et favorise l'oxygénation du sang.


Les poules métabolisent naturellement leur propre vitamine C, mais dans des cas extrêmes, un petit coup de main peut les aider. Un dosage de l'ordre de 200 à 400mg de vit. C par kg de nourriture, soit 30 à 60mg par jour et par poule, leur permettra de mieux supporter la chaleur et le stress thermique pendant quelques jours. (1) (2)


D'ordinaire, elles détestent le goût “orange” qu’on trouve dans la plupart des cachets effervescents et refusent d’en boire. Vous aurez du mal à trouver de la vitamine C alimentaire sans arôme, mais c’est possible. (exemple ici - ou ici)

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Les autres mesures ordinaires et efficaces pour atténuer l’impact de fortes chaleurs sont : 

➜ Mettre à portée immédiate (juste à côté d’elles) un récipient d’eau fraîche renouvelé plusieurs fois dans la journée.
➜ Vérifier qu’aucune d’entre elle n’est isolée au soleil
➜ Passer régulièrement les pattes et la crête à l’eau fraîche pour faire descendre leur température,
➜ Mettre à disposition des fruits  : melon, pastèque, concombre frais.
➜ Donner des végétaux coupés en morceaux de 2 ou 3cm : herbe, gazon,, pissenlit, trèfle..
➜ En cas de chaleurs extrêmes, placer une poule au frais (cave, garage ..) pendant 30 min pour que sa t° redescende.
➜ Vérifier leur état régulièrement, et bien entendu… surveiller leur déshydratation


(1) Source 1     (2) Source 2 


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3. La déshydratation


Par de fortes chaleurs , l'absence d'eau peut causer la mort d'une poule (ou de tout un élevage) en moins de 12 heures. Si elle ne peut pas s’abriter du soleil, l’hyperthermie (le coup de chaleur) peut la tuer en moins d’une heure.


"Priver d'eau une poule" ne signifie pas forcément que vous lui retirez l'abreuvoir ou que vous avez oublié de le remplir  il suffit juste  d'avoir mis dans l'eau quelque chose qu'elle refusera de boire : vitamines, huiles essentielles ou certains compléments du commerce. Les supplémentations en vinaigre ou en ail doivent toutes être arrêtées et retirées dès que la chaleur dépasse 25°c.


Une poule dérangée par une odeur refusera l’eau et n'ira plus y boire, même si elle a soif.


Tout comme pour l'être humain, la déshydratation peut survenir rapidement mais la réhydratation est en revanche assez lente. Un simple verre d'eau ne suffira pas à vous réhydrater, et de même, il faudra plusieurs jours à une poule pour se remettre d'une  déshydratation.

La déshydratation est une pathologie en tant que telle. L'absence d'eau va entraîner des conséquences bien plus graves que la soif. L'organisme va très rapidement se mettre à l'arrêt, les reins, la circulation sanguine, les électrolytes vont dangereusement baisser. La digestion sera à l'arrêt. La poule ne se déplacera plus. L’organisme va fortement s'acidifier et provoquer des douleurs intenses de brûlures internes.

Dans certaines circonstances, une poule peut aussi ne pas boire d'elle même, ne pas y arriver “physiquement” : ne pas pouvoir déglutir ou ne pas avoir la force d'ingérer : la poule est alors forcément malade : coup de chaleur, obstruction de la gorge, capillarioses, lésions internes ainsi que toutes les pathologies entraînant une immobilisation qui, de fait, empêche la poule de s’abreuver.


Ça ne veut pas dire qu'elle n'a pas soif. Sentiment de soif, capacité à boire et déshydratation ne sont pas forcément liés.



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4. Maladies et déshydratation


Il est important de retenir qu'une déshydratation "sévère" produit LES MÊMES symptômes que certaines maladies virales ou bactériennes.


La plupart du temps, quand une poule reste prostrée ou immobile, la réaction naturelle est d'essayer d’identifier ou de soigner la maladie que vous voyez, sans imaginer que le principal danger vient d'ailleurs : les symptômes de maladie vont masquer ceux de la déshydratation qui passe totalement inaperçue.


Le premier réflexe en cas de maladie, d'abattement ou d’immobilisation doit être d’isoler la poule ET de vérifier son état hydratation (on va voir comment faire juste après). 

La poule malade et immobilisée se déshydrate à un rythme extrêmement rapide. Cet état entraîne diarrhées et/ou vomissements qui vont générer une perte en minéraux, principalement en chlorures et en potassium.


L’eau qui doit être donnée à une poule déshydratée doit donc être mélangée à du sel qui permettra à l’organisme de compléter cette perte en minéraux et de fixer l’eau dans l’organisme. Évidemment, une eau trop salée aggravera l’état de la poule ou la tuera, et une eau sans sel sera inefficace pour la réhydrater. Cette proposition est de l'ordre d'1% : 1g de sel pour 100ml d'eau.

Une poule aura bien plus de mal à se soigner, et à se rétablir si elle est déshydratée. Les poules peuvent mourir aussi sûrement de déshydratation que de la maladie qui les empêche de boire.



Comme l'illustre ce petit schéma, cet état va plonger la poule dans un processus rapide et inéluctable : on voit régulièrement des poules décéder au cours de leur traitement, sans cause évidente... aller mieux, puis replonger. 


En effet, les symptômes de la maladie s’atténueront peut-être grâce à vos soins... mais pendant ce temps, 2, 3, 4 jours passent et la déshydratation cause la mort de la poule.


Dès qu'une poule ne peut plus boire ou s'alimenter normalement, elle est en danger de mort à très court terme.

Il arrive aussi très souvent que faute de vétérinaire, le diagnostic initial soit erroné, qu’il n’y ait pas les médicaments appropriés et que “l’éleveur” commence à donner tout ce qu’il peut en espérant que ça passe : vermifuge, restes d’antibiotiques, vitamines, EPP… Ce qui, évidemment, ne fait qu’empirer son état, la rend encore plus faible, la déshydrate encore plus et finit par l’achever.



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5. Comment tester la déshydratation ?


La plupart du temps quand on demande à un éleveur d'une poule malade où en est sa déshydratation, la réponse est du type : " C'est bon, elle boit" ou "ok, déshydratation...heu...normale". ;-)


On va donc commencer par voir comment déterminer précisément cet état. ►Cette méthodologie doit être un réflexe dès qu’on examine un animal ou dès qu’on soupçonne un problème :


▪1▪ Test du pli cutané. C'est le test le plus simple et le plus rapide : on tire doucement la peau de la poule entre le pouce et l'index, en général sur l'abdomen, là où il n'y a pas trop de plumes et on relâche. Le résultat du test dépend du temps de remise en place de la peau : • immédiat, • 1 seconde, • 2 secondes, • 3 secondes ou • la peau reste en place. Ce test rapide est efficace mais doit s’accompagner d’un examen général de l’état pour déterminer exactement où en est la poule.


▪2▪ Examen du bec : on recherche le degré d’humidité de la cavité buccale et notamment la présence de “fausses membranes”. Ces filets de mucus ressemblent à de la “salive” et s’observent à l’ouverture du bec, entre le palais, le pharynx et la langue. Ils se rompent d’autant moins facilement que l’oiseau est déshydraté. Leur nombre, leur taille, leur consistance et leur épaisseur varient proportionnellement au degré de déshydratation de l’organisme.


▪3▪ Examen des yeux : l'œil d’une poule en bonne santé est bombé, humide et brillant. Une poule déshydratée présente une cornée sèche, pâle et terne.


▪4▪ L’examen cutané permet de vérifier la souplesse et l’aspect de la peau fine et transparente du bréchet, en écartant soigneusement les plumes qui la recouvrent. Elle doit glisser facilement sur le bréchet et les muscles pectoraux lors d’une légère traction de droite à gauche. (NB : Le bréchet est le sommet des côtes saillantes situé sur le torse, sous la poule)


▪5▪ La couleur des pattes : en cas de déshydratation intense, les écailles présentent parfois un aspect terne et une couleur plus foncée (écailles jaune vif pouvant virer au beige).


▪6▪ La température des pattes : la palpation des membres inférieurs permet parfois de mettre en évidence un refroidissement lié à une sévère déshydratation.


▪7▪ La pesée est l'instrument de mesure principal de la réhydratation ou de déshydratation. Pour mesurer une déshydratation, la pesée devra se faire au gramme ; au pire à +/- 10g. Un pèse personne ne sera d’aucune utilité (précision 100g). Utilisez une balance professionnelle pour animaux (entre 50 et 400€) ou un simple pèse bagage à poignée (entre 3€ et 10€) Souvent, on utilise la seconde solution :-) mais ce qui importe, c’est de l'avoir à portée de main AVANT qu’un problème ne se déclare :-) (voir ici : peser une poule §10)


Ce protocole vous permettra d'estimer vous-même l'évolution d’une déshydratation. Une poule de 2kg qui perd 100g a perdu 5% de son poids total. On dit qu’elle est déshydratée à 5%.


Ceci implique que vous devez régulièrement, si possible 1 ou 2x par mois, peser vos poules pour connaître l'état initial. Dans le milieu médical, on considère que tout oiseau recueilli en urgence vétérinaire est déjà considéré comme déjà déshydraté à 5%, si on ne dispose pas de ce poids de référence.


Dès qu'une poule malade ne peut plus se nourrir et boire seule , pesez-là matin et soir. Notez scrupuleusement ce poids pour suivre et évaluer la dégradation de son état de santé et l'évolution de cette déshydratation tout au long des soins.



Ce petit tableau récapitulatif établi à partir de sources médicales, récapitule les différents états cliniques . Il vous permettra d'estimer facilement le pourcentage de déshydratation :


5-6% Prise en charge de l'oiseau malade. La peau est moins souple et glisse moins sur les tissus sous-jacents. Ce premier état est considéré comme la première étape d’une déshydratation. Cette situation “mineure” peut très rapidement s’aggraver.

 7-8% La peau est desséchée (on pince la peau et elle revient lentement). La gorge est sèche avec une présence de filets de mucus : les fausses membranes. L'œil est terne et ne brille plus. Il s'agit d'un état de déshydratation sévère.

 10-12% Tous les signes précédents + persistance du pli de la peau ( on pince la peau et elle conserve sa forme). Pattes de couleur ternes et froides. Vomissement et diarrhées. Cet état est jugé critique et affecte désormais tout l'organisme : système respiratoire, digestif, nerveux et sanguin.

 >12% Dépression de l'état général extrême. Tachycardie (accélération du pouls, emballement du cœur). Signe d'agonie. Un diagnostic vital est engagé, la mort de l'animal est imminente.


Vous noterez la fulgurante progression d'un état mineur à un état critique.

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6. Prise en charge d'urgence :


L'espérance de vie d'une poule immobilisée qui ne peut plus boire seule est au maximum de 2 à 3 jours.


Le seul choix possible est de l’amener en urgence vétérinaire. Si vous n’avez aucun moyen d’accéder à un service médical,  il n'y a aucune alternative. Il faudra assurer vous-même sa réhydratation et ses soins :


Identifier la cause de l'immobilisation ou de la maladie et le traitement approprié 

Avoir le matériel et les médicaments nécessaires ou vous les procurer immédiatement : huiles essentielles, kit de perfusion… 

➌ Estimer son état de déshydratation et mettre en place une perfusion.


► Il est tout à fait possible d’apporter des soins efficaces à une poule dans cet état, même avec peu de moyens et des notions médicales très limitées. Dans de très nombreuses situations, si son état n’est pas trop grave, vous pourrez la sauver. Par contre, vous n’avez pas le luxe d’attendre ou de ne rien faire, sinon il est quasiment certain qu’elle ne s’en remettra pas.



1- Mettez la poule à l'abri. Isolez là des autres pour éviter une éventuelle contamination. Maintenez-la au chaud (ou au frais). Pesez la poule. Estimez son état de déshydratation et commencez  immédiatement une alimentation en eau à la seringue, à renouveler si possible toutes les heures (voir ci-dessous).


2- Placez la poule dans une caisse ou une cagette en faisant un nid de paille recouvert de plusieurs feuilles de sopalin. Si elle a des diarrhées, découpez toutes les plumes souillées à ras, autour du cloaque avec des ciseaux. Nettoyez la zone à la bétadine.


■ 3- Dans la mesure du possible, essayez d’alimenter la poule. Voyez ce que la poule peut ingérer : riz, sardines, viande hachée, boudin noir .. en boulettes de la taille d'un petit grain de raisin. A défaut : Jaune d'œuf et eau à la seringue d'1ml. si possible toutes les 3h


■ 4- Il est possible qu’il ne s’agisse “que” d’une déshydratation, mais bien souvent il y aura aussi une maladie. Vous trouverez ici plusieurs articles qui vous aideront à identifier les symptômes, la pathologie et les éventuels traitements. Index des articles.



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Pour réagir rapidement et efficacement en cas de maladie, vous devez avoir chez vous un stock de médicaments, de matériel et d’huiles essentielles pour les maladies les plus courantes. (voir ici, si ce n’est pas déjà fait).
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7. Comment faire boire “à la seringue”


➨ Faire boire une poule ne pouvant s'abreuver d'elle-même est un exercice difficile et délicat. On utilise en général une petite seringue d'1ml. Diluez 0.9 à 1g de sel dans 100ml d’eau. Ce dosage doit être précis au gramme.


➨ Si vous n’avez pas de balance de précision : allez acheter une poche de na-cl à 0.9% en pharmacie (entre 2 et 5€). Solution alternative mais beaucoup moins précise : mélangez et diluez 2 cuillères à café (rases) de sel fin (2x5g) dans 1 litre d’eau.


➨ Une fois la seringue prête, enveloppez la poule dans un linge ou une serviette, enserrez délicatement le cou de la poule par derrière pour ramener les doigts en forme de pince au coin du bec. La poule est immobilisée et ouvre le bec par pression entre pouce et index. Si possible, il est préférable d'être 2, mais l’opération peut toutefois s’effectuer seul(e)

Méthode 1 : De l'autre main, versez quelques gouttes à l'avant du bec pour qu'elle l'avale ou si la poule le peut,  donnez lui en goutte à goutte en relâchant le bec pour voir si elle arrive à boire seule à la pipette.

C'est la méthode la plus sûre, car la poule va elle-même gérer sa déglutition, mais cette méthode est très lente et parfois la poule n'y arrivera pas.


Méthode 2 : Glisser la seringue d’1ml dans la gorge, au fond à gauche. Il s'agit en soi d'un geste "médical", si vous mettez de l'eau par erreur dans les poumons ( trachée au milieu de la gorge), cette fausse route peut causer un étouffement et une mort subite de la poule. Donc soyez très très délicat, versez un peu d'eau, retirez la seringue pour laisser la poule déglutir et souffler et recommencez. Soyez apaisant avec la poule. Parlez lui. C'est pour elle un très gros effort.


Efficacité et limites de la seringue.

➨ Ces 2 méthodes seront stressantes et épuisantes pour la poule. Sachez néanmoins que ces petites quantités vont humecter la gorge, les muqueuses et apaiser sa soif. Faute de mieux, ce soin palliatif est indispensable et efficace.


➨ En revanche, vous parviendrez très difficilement à réhydrater une poule déshydratée à + de 5% ou immobilisé suite à une maladie grave. Au mieux, vous pourrez lui faire boire entre 20 et 60ml par jour...peut-être 80ml à 100ml, si vous y consacrez une bonne partie de la journée mais cette solution ne sera que provisoire. Comme vous pouvez le voir ci-dessous, la progression de la déshydratation sera bien plus rapide que la réhydratation à la seringue.

 

Ci-dessous : En rouge l'évolution de la déshydratation - En bleu : l'apport en eau.

 


➨ Même si vous parveniez à renouveler 100 fois l'opération en faisant des pauses entre chaque seringue d’1ml, vous auriez tout au plus comblé la moitié des besoins journaliers en eau de la poule, sans compter les pertes en vomissement et diarrhées supplémentaires.


➨ Néanmoins, dans cet état, chaque goutte lui sera précieuse, soulagera sa soif et réduira un peu ses souffrances. Et c’est déjà très bien. Vous pourrez ainsi gagner un peu de temps et faire tenir la poule jusqu'à une consultation vétérinaire.


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8. La perfusion intraveineuse


Quel que soit l'état de la poule, si elle ne boit plus par elle-même depuis 2 jours, amenez-là directement chez un vétérinaire. Elle y sera mise sous perfusion et pourra recevoir les soins appropriés et un véritable diagnostic médical. C’est la meilleure décision que vous puissiez prendre.

Si vous n'avez aucune possibilité d’amener votre poule immobilisée et incapable de s’abreuver chez un vétérinaire : soit vous allez devoir la perfuser vous même, soit votre poule ne survivra pas. L’agonie durera plusieurs jours et elle finira par décéder d'un arrêt cardiaque, des suites de sa maladie initiale, ou vous devrez l'euthanasier pour lui éviter ces souffrances.


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 ■ Généralités sur les perfusions.

• Une perfusion peut être intra-osseuse, sous cutanée ou intraveineuse. Les deux premiers modes nécessiteront de bonnes connaissances médicales et anatomiques.

On se concentrera donc uniquement sur la perfusion en Intraveineuse, plus simple à réaliser, et qui répondra parfaitement aux besoins de réhydratation.


• Si vous n’êtes pas familier avec ces manipulations, le principal obstacle sera principalement lié à votre stress et votre manque d’expérience, mais l’opération est bien moins complexe qu’une intervention pour une pododermatite, une désobstruction de la gorge, ou un jabot bouché, par exemple.


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■ La perfusion intraveineuse


Même si elle peut paraître impressionnante au premier abord, une perfusion en intraveineuse sur une poule n’est pas si difficile à réaliser. Les veines des poules sont un peu plus étroites que les notres mais leur peau est très fine, ce qui permet de les voir assez facilement en transparence.


Si vous avez déjà effectué une ponction d’ascite, ça y ressemble un peu et vous n’aurez pas trop de difficulté.

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■ Notions à connaître :

Ci-dessus : le circuit veineux de la poule sur lequel je vous ai indiqué le sens de circulation et la position des points d'entrée.


 Poser un point d’entrée pour une perfusion n’est pas bien compliqué. Il suffit de localiser une des veines périphériques et de visualiser dans quel sens s'écoule le sang. Le cathéter (l’aiguille) doit être dans le sens “du courant” - vers le cœur - pour que l’eau de la perfusion s’écoule naturellement dans le flux sanguin.


Les photos que vous pouvez voir ici indiquent où est la veine (flèche noire) et dans quel sens on introduit l’aiguille de la perfusion pour être dans le bon sens (flèche rouge). 

Les trois veines les plus simples à localiser pour servir de point d'entrée sont le cou, les pattes et l’intérieur des ailes. La plus grosse est la jugulaire (celle du cou). Vous trouverez aussi sans difficulté la petite veine de l’aile, un peu plus fine mais très facile d’accès. La patte possède même 2 points d’entrées : sur la partie écailleuse et  dans la cuisse sous les plumes, elles ne sont pas toujours facile à identifier selon l’animal, mais ça peut être une bonne alternative si vous la voyez.


Piquer “dans” la veine ne pose aucun problème. Il faut savoir que la peau de la poule est très fine, vous n’avez donc pas à piquer profondément, c’est tout juste si vous allez effleurer le dessous de la peau. Si vous piquez à côté, évidemment c’est un échec, la poule sentira une petite douleur mais c’est tout. 


Vous pouvez essayer plusieurs fois, restez juste délicat(e) et patient(e). Il peut arriver - mais pas toujours - qu’un peu de sang reflue après avoir piqué, si on abaisse l’aiguille sous le niveau de la veine. ► Ceci indiquera que tout s’est bien passé et que vous êtes “dans” la veine. Il n’existe pas vraiment d’autre moyen de certifier que l'aiguille est bien en place : il faudra donc se fier à ce que vous voyez et ce que vous ressentez.


Réussir la pose d'une perfusion “du premier coup” n’est pas toujours facile et c’est normal. Il existe cependant un certain nombre d’astuces pour faciliter le geste et améliorer les chances de succès :

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1ère étape : préparation


  ➊  Comme pour la plupart des soins , mieux vaut avoir prévu votre kit de perfusion AVANT, car vous l'avez compris, le temps de trouver (ou de recevoir) tout le matériel nécessaire et de vous préparer à l'intervention, l'état de votre poule se sera déjà sérieusement dégradé. Un kit complet pour perfuser vous coûtera environ 10 à 12€.


 ➋  Vous devrez nécessairement être deux : un pour tenir la poule et aider, désinfecter, trouver et préparer le matériel, l’autre pour perfuser. Coupez votre téléphone, mettez vous dans un endroit calme et bien éclairé.



 ➌ Préparez tout votre matériel à l’avance sur un plateau propre (stérile) sur lequel vous mettrez :

▪Des gants latex 
▪Des ciseaux
▪De l’alcool à 70°
▪Deux poche souple de Na-cl à 0.9% de 250ml ou 500ml (env.5€)
▪Un paquet de compresses stériles
▪Au minimum 2 ou 3 cathéters fins pour VVP :  24GA, 26GA et  22GA si possible avec ailettes, 2€ en pharmacie.
▪1 tube de raccordement avec robinet. 
De grands linges propres : serviette de bain pour envelopper la poule, essuyer, éponger…


  ➍  Choisissez une des veines qui servira de point d'entrée : le cou, la patte, l'intérieur de l'aile. Prenez la plus visible et la plus rectiligne : elle doit être bien droite sur 2 ou 3 cm de long. A priori, la plus indiquée pour débuter est celle de l’aile, mais c’est aussi une question d’habitude… ou de poule. 

  ➎  Si vous n’arrivez pas à bien voir la veine ressortir, utilisez un gant latex rempli d’eau chaude posé quelques minutes au contact de la peau pour chauffer la zone et dilater les vaisseaux sanguins.

  ➏  Tapotez sur la veine pour qu'elle ressorte, et soit plus facilement visible et accessible. Le but est de provoquer une légère inflammation qui va favoriser la dilatation veineuse.


  ➐  Une fois la zone choisie et identifiée, dégagez largement la zone avec des petits ciseaux en coupant toutes les plumes jusqu’à ce qu’elle soit parfaitement visible. Prenez-soin de ne pas couper “à ras” de la peau, la base des plumes est irriguée, si vous coupez, ça va saigner. Il ne faut pas utiliser de rasoir mécanique susceptible de provoquer des lésions et irritations cutanées.


  ➑  L'asepsie du matériel et de la poule s'imposent, le matériel doit être stérile et la poule désinfectée. Le risque d’infection est toujours présent. La préparation s’effectue toujours en quatre temps : 

  1.  Lavage avec un savon, 
  2.  Rinçage,
  3.  Séchage 
  4.  Antiseptique (alcool à 70°).

Aspergez abondamment de désinfectant, essuyez avec une compresse stérile, jetez la compresse, attendez 30 secondes et renouvelez 2 ou 3 fois l’opération.

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2ème étape : Pose du cathéter


 ■ Le cathéter est un petit dispositif médical destiné à prélever ou à introduire un fluide dans le corps. On l’utilise notamment pour une prise de sang ou pour une perfusion.


• Ce petit appareil est composé de 2 parties emboîtées : l’une est surmontée d’une aiguille, et la seconde d’un petit tube souple très fin. Le cathéter s’introduit au départ comme une aiguille de seringue, sur quelques millimètres. Une fois en place dans la veine, on fait coulisser ce petit tube vers l’avant (dans la veine) tout en retirant l’aiguille vers l’arrière.


• Le cathéter sert alors de “point d’entrée” pour y raccorder un dispositif, notamment une poche à perfusion, et pouvoir la changer quand elle est vide sans avoir à effectuer de nouvelles piqûres.


• Même si l'objet semble un peu effrayant au premier abord, il est en fait conçu pour améliorer le bien-être et notamment éviter de supporter une aiguille rigide ou de blesser en piquant de manière répétée.


• Il existe plusieurs tailles correspondant au diamètre de la veine dont la taille est exprimée en “Gauges” (GA ou G). Plus le chiffre est élevé, plus le diamètre est fin. Un diamètre standard pour une poule est de l’ordre de 24GA ou 26GA pour une petite poule.


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■ Comment poser un cathéter :


  ➊   Bien tendre la peau entre l’amont et l’aval du point d'entrée. Cela facilite le passage de l’aiguille et évite également que le vaisseau « roule » ou qu’elle se dévie.


  ➋  Immobilisez bien la poule, et piquez délicatement (dans le bon sens : vers le cœur) avec l’aiguille du cathéter, biseau vers le haut avec un angle de 30° sur 2 ou 3 mm. La veine se trouve à peine à 2 ou 3 mm de profondeur.



  La piqûre : Vous allez sentir une petite résistance quand vous traversez la peau. Fléchissez légèrement l’aiguille jusqu’à ce qu’elle soit quasiment horizontale dans l’axe de la veine en l’enfonçant sur environ 5mm dans la veine. S’il s’agit de la veine jugulaire, maintenez la tête et le cou dans la paume de la main avec le pouce pour maintenir le cou en extension.


➍  La bonne position de l’aiguille dans la veine doit être vérifiée visuellement et éventuellement par la présence d’un reflux sanguin en inclinant l’aiguille sous le niveau de la veine.


Si vous êtes bien “dans” la veine, faites coulisser doucement le cathéter dans la veine tout en déclipsant l’aiguille en la tirant vers le haut. (voir schéma ci-dessus) • Si vous êtes à côté, re-désinfectez aiguille et peau et recommencez. Une fois l’aiguille séparée du cathéter, vous ne devez plus tenter de la remettre en place : utilisez un autre cathéter neuf et recommencez. 



Le cathéter est en place et vous avez quasiment terminé. Ça aura pris environ... 5 secondes ;-)

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Un cathéter peut être maintenu pendant 96h. Vous devez ensuite le retirer, désinfecter et au besoin recommencer avec un cathéter neuf. Dans l’absolu, la poule peut rester sous perfusion aussi longtemps que nécessaire : tant qu’elle ne peut boire seule.

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3ème étape : pose et gestion de la perfusion


Il est temps de raccorder la perfusion qui aura été préparée avant le geste, solidement accrochée en hauteur, à au moins 50cm au-dessus de la poule. Généralement il s’agit d’un système à vis, pour éviter que le système ne se déboîte. La bonne fixation est confirmée par un cliquetis après un quart de tour dans le sens horaire. 


L’eau se trouvant dans la poche de perfusion coule par gravité et l’air qui peut se trouver dans le circuit remonte tout seul. Par conséquent, il faut toujours que cette poche se trouve au-dessus du niveau de l’animal. 


La quantité d’eau à perfuser va dépendre de l’état de déshydratation et du poids de l’oiseau. La quantité (Q) de solutés à administrer est calculée de la façon suivante :


Q (litres) = Pourcentage de déshydratation (l/kg) x Poids (kg)


… auquel s’ajoutent 1.5 à 2 ml/kg/h correspondant aux pertes en fluides de la poule pendant qu’elle sera soignée. Cette quantité est relativement empirique, pensez simplement qu’il faudra compenser sa perte d’eau naturelle, et éventuellement en diarrhée ou en vomissements tout au long de votre intervention. 

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 Petit exemple de quantité à perfuser : Pour une poule de 2.3kg déshydratée à 11%, la quantité perfusée progressivement sera de 250ml + env. 200ml par jour d’immobilisation à administrer sur des périodes de 4 à 6 heures pendant 1 à 2 jours : pour cet exemple 150ml administrés en 3 fois (soit 450ml).


Tant que l’état de la poule l’exige vous pouvez maintienir une perfusion compensant juste sa perte journalière de l’ordre de 1.5 à 2ml par kg de l’animal et par heure jusqu'à ce qu’elle puisse s’abreuver seule ou que vous ayez pu la faire prendre en charge par un service de soins approprié.



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N’étant pas vétérinaires et pratiquant sans doute cette intervention pour la première fois, vous ferez donc au mieux pour essayer de respecter le volume, le débit et la durée de perfusion. En suivant l’opération pas à pas, il est quasiment impossible de ne pas y arriver ;-)


Si poule ne souffre "que" d’une déshydratation, les chances de rémission avec une perfusion posée suffisamment tôt, sont de l’ordre de 100%, en veillant particulièrement à la désinfection et l’asepsie pour éviter l’infection : principal danger de l’opération.


Si la déshydratation est consécutive à une maladie, cette intervention n’est évidemment que le soin palliatif d’urgence qui vous permettra de stabiliser la poulette et de la mettre -pour un temps - hors de danger; soit pour trouver un vétérinaire qui la prendra en charge, soit pour soigner vous-même la pathologie qui en est à l’origine. 

Si vous ne l’avez pas encore fait, je vous recommande la lecture des différents articles sur les symptômes et les huiles essentielles afin de tenter de diagnostiquer, et si possible, soigner le plus efficacement possible votre cocotte.

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Auteur : JT


Sources : 

▪Infographie, tableaux et schémas : JT
▪Crédits photos (identification veineuse) : Nature, norecopa - JT - Association de protection "Ferme de lovely" - Clinique Vétérinaire Anidoc.

Sources techniques :

▪Manuels de pathologie aviaire
▪Avian Fluid Therapy - Animal Veterinary Association Congress Proceedings, 2017 (Tully & al.) Veterinary Clinical Sciences, School of Veterinary Medicine, Louisiana State University.
▪Manuel de prise en charge d’urgence d’oiseaux malades (Tamara solana - OATAO)
▪Manuel vétérinaire de mise en place de VVP (voie veineuse périphérique / perfusion)
▪Fiches techniques d’utilisation de cathéter en milieu médical
▪Le point vétérinaire : technique de réanimation d’un oiseau sauvage
▪Injections in Bird / Injection chez les oiseaux (Risi - Sauvaget 2013) Centre hospitalier vétérinaire Atlantia.
▪Techniques for rehydration of wild birds Réanimation de la faune sauvage. Techniques de réhydratation des oiseaux sauvages (Risi - 2002) point vétérinaire volume 33 p.28-32.
▪La réhydratation et la correction des déficits énergétiques des animaux de compagnie lors de troubles digestifs - La dépêche vétérinaire - Dr Bouzouraa 2022
▪Techniques for collecting blood from the domestic chicken - Lab animal (Kelly & al. 2013)
▪Soins infirmiers, techniques de pose de VVP en milieu hospitalier.

▪Norecopa : vidéos montrant des techniques intraveineuses aviaires : ici



Cet article n’est pas une publication médicale, elle est publiée à titre informatif.


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